« Tout va très bien »

Lorsque l’on écoute le gouvernement ou le patronat ce n’est que plaintes et lamentations sur la triste situation des patrons, inquiets, stressés, harcelés par des réglementations tatillonnes, des hordes d’inspectrices et d’inspecteurs du travail… Tout cela alors que selon eux, la situation de la santé au travail et des conditions de travail des salariè-es n’a jamais été aussi bonne. C’est ce qui leur a permis dans le cadre de la contre réforme des retraites complémentaires de ponctionner sans scrupule la branche AT/MP (Accidents du Travail Maladies Professionnelles) alors même que il y a  une sous-déclaration et la sous-reconnaissance des maladies professionnelles et des accidents du travail qui n’a jamais été aussi forte et que  la Sécurité sociale et les pouvoirs publics ont entrepris de durcir les conditions de reconnaissance de certaines maladies professionnelles.

Et pendant ce temps là…

La dernière enquête Conditions de travail de la DARES (Direction de l’Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques) nous apprend pourtant qu’en 2013, en France métropolitaine :

  • 1 salarié sur 2 déclare risque d’être blessé ou accidenté au travail.
  • 1 salarié sur 3 déclare être soumis à au moins 3 contraintes physiques au travail (parmi les suivantes : rester longtemps debout, rester longtemps dans une posture pénible, effectuer des déplacements à pied longs ou fréquents, devoir porter ou déplacer des charges lourdes, subir des secousses ou des vibrations).
  • 1 salarié sur 3 déclare être exposé à des risques infectieux au travail.
  • 1 salarié sur 3 déclare risquer des accidents de la circulation au cours du travail.
  • Près de 1 salarié sur 3 déclare respirer des fumées ou des poussières au travail.
  • Près de 1 salarié sur 3 déclare être en contact avec des produits dangereux au travail.
  • Près de 1 salarié sur 5 déclare être exposé à un bruit intense au travail.
  • 9% des salariés déclarent avoir eu au moins un accident dans leur travail au cours de l’année (7% en 2005). Parmi eux, concernant le dernier accident survenu : signalement à l’entreprise : 83% (88% en 2005), reconnaissance et indemnisation au titre d’accident du travail : 46% (52% en 2005), mise en place par l’employeur de mesures pour réduire les risques suite à cet accident : 22% seulement.

La  même DARES, dans l’exploitation des résultats de l’enquête Sumer 2010   nous apprend, par exemple, à propos des expositions aux produits chimiques cancérogènes que:

  • Une exposition de 10 % de l’ensemble des salariés (soit près de 2,2 millions) à au moins un produit chimique cancérogène au cours de la dernière semaine travaillée.
  • Une population particulièrement concernée (y compris par la multi-exposition) : les ouvriers et les salariés travaillant dans des activités de maintenance ou dans le secteur de la construction.
  • Des expositions plus fréquentes chez les jeunes.
  • 38 % des situations d’exposition de durée et/ou d’intensité importantes.
  • Une protection collective localisée existante dans seulement 21 % des situations d’exposition.
  • Et une ventilation générale des locaux dans seulement 19 % des cas.

 

Mais aussi…

 

La société Tefal poursuit en justice une inspectrice du travail pour avoir osé divulger des informations internes de cette même société prouvant que Tefal faisait pression sur les rouages de l’État pour l’empêcher d’effectuer son travail. Pire, elle le fait avec le soutien du Procureur de la République qui dans le même temps classe les PV de la même inspectrice…

 

Le gouvernement hurle contre les salarié-es d’Air france pour deux chemises déchirées et ne dit rien sur les emplois supprimés, les conditions de travail dégradées, les salaires bloqués d’une société qui annonce des cossus bénéfices…

 

La nouvelle ministre du travail prend comme premier dossier la préparation d’une loi qui dans la suite du rapport Combrexelle aura pour principal objectif de poursuivre la déréglementation et d’affaiblir les protections collectives des travailleuses et travailleurs.

 

Heureusement…

 

Des luttes existent déterminées et nombreuses, comme à Air France ou comme pour les salarié-es du nettoyage en grève depuis plusieurs semaines à Paris, comme aussi à la Poste où les conflits se multiplient contre les réorganisations ou comme à Adrexo contre le management autoritaire. Loin du « dialogue social » c’est un véritable rapport de force social qui se construit.

 

Des initiatives larges et fortes porteuses de mobilisations et de propositions existent, comme celle à l’initiative de la Fondation Copernic pour défendre le Code du Travail qui va prendre de l’ampleur dans les semaines qui viennent et comme les Etats généraux de la santé des travailleuses et travailleurs qui devraient avoir lieu les 16 et 17 mars 2016 à Paris à l’initiative du collectif issu de l’appel pour ne plus perdre sa vie à la gagner.  A nous de poursuivre et élargir ces luttes!