Le lendemain matin, je me lève à cinq heures trente, je pars à six heures quinze vers Huisseau. On est en septembre, le jour se lève à peine. Je vois des quantités de lapins dans le parc de Chambord. J’arrive à la scierie en avance. Tout est sombre sous le hangar. J’ai dans mes sacoches ma gamelle qui contient mon repas de midi. Le chauffeur bourre la chaudière et fait monter la pression. Je m’approche du four et je me chauffe. Il est sept heures moins dix. Tout le monde arrive tout à coup et se rassemble autour du four. Garnier arrive bouffi, il n’a pas fini de s’habiller, il sort du lit, il ne mange pas le matin. Après de brèves politesses, à sept heures moins cinq, il gueule : Allez, graissez !
L’auteur de ce texte, rédigé dans les années 1950, désirait garder l’anonymat et ne souhaitait pas se voir éditer. P. Gripari, défendit le manuscrit et le fit paraître. Le narrateur, qui cherche du travail avant d’effectuer son service militaire, est embauché dans une scierie. Il raconte les cadences de production intensives, les coups bas et les petites haines entre employés. Prix Mémorable 2013.