Les deux affaires tranchées le 8 mars 2017 par la cour de cassation ont comme point de départ l’enquête menée par un employeur après la démission d’un salarié dénonçant le harcèlement moral du directeur du magasin. Le rapport d’enquête s’est révélé accablant pour trois responsables du magasin qui ont donc été licenciées : le directeur du magasin pour faute grave, la responsable des ressources humaines et un contrôleur de gestion pour cause réelle et sérieuse.
La cour de cassation a eu à juger des deux litiges en contestation de la cause réelle et sérieuse pour des raisons différentes.
- Pour sa défense la responsable des ressources humaines estime qu’elle « qu’elle était tenue d’obéir à son supérieur hiérarchique direct », que l’employeur « n’avait mis en oeuvre aucun moyen organisationnel permettant à la salariée de dénoncer les agissements de son Directeur ». Mais les juges ont relevé que travaillant en très étroite collaboration avec le directeur du magasin « elle avait connaissance du comportement inacceptable de celui-ci à l’encontre de ses subordonnés … qu’elle n’a rien fait pour mettre fin à ces pratiques alors qu’en sa qualité de responsable des ressources humaines, elle avait une mission particulière en matière de management, qu’il relevait de ses fonctions de veiller au climat social et à des conditions de travail “optimales” pour les collaborateurs ». Ils ont également retenu « qu’en cautionnant les méthodes managériales inacceptables du directeur … la salariée avait manqué à ses obligations contractuelles et avait mis en danger tant la santé physique que mentale des salariés ».
- Le contrôleur de gestion mis en disponibilité par l’employeur (le temps pour lui de mener son enquête), a considéré que cette mise en disponibilité était en fait une sanction ce qui épuisait le pouvoir disciplinaire de l’employeur, rendant ainsi le licenciement ultérieur sans cause réelle et sérieuse. Les juges ont rappelé « que l’employeur peut prendre, préalablement à la procédure de licenciement, des mesures provisoires adaptées destinées à garantir les intérêts de l’entreprise pourvu qu’il n’en résulte pas, sans accord du salarié, une modification durable du contrat de travail ».
Selon la cour d’appel et la cour de cassation, ses conditions étant réunies, la décision de l’employeur s’analyse donc comme une mesure conservatoire et non comme une décision disciplinaire.
Comme on le voit dans cette affaire, l’auteur direct du harcèlement moral n’est pas le seul à pouvoir être sanctionné. D’autres responsables de l’entreprise peuvent l’être pour n’avoir rien tenté pour y mettre fin au regard notamment de leurs obligations contractuelles en matière de santé et sécurité au travail.
Cass. soc., 8 mars 2017, n°15-24406 et Cass.soc., 8 mars 2017, n°15- 23503