Pour de nombreux chercheurs, l’exploitation de la subjectivité des travailleurs est au centre des dispositifs du management moderne. En effet, après avoir contraint scientifiquement les gestes de métier lors du taylorisme, les entreprises (face, notamment, à la tertiarisation de l’activité) détourneraient aujourd’hui à leur profit l’implication personnelle dans le travail. Sans remettre en cause ces analyses, l’approche de Pierre Bourdieu nous rappelle que l’implication dans le travail a toujours fait partie des conditions réelles de son effectuation… et de l’exploitation : « Les travailleurs peuvent concourir à leur propre exploitation par l’effort qu’ils font pour s’approprier leur travail et qui les attache à lui. » Souvent perçu comme une forme d’émancipation, l’investissement dans le travail n’est en ce sens que l’envers subjectif d’une même pièce, celle de l’asservissement au salariat.
Cet ouvrage rassemble une vingtaine de contributions. En reprenant les principaux concepts du sociologue (habitus, champ, capital, violence symbolique…), le rappel des structures de domination vient avantageusement compléter les travaux essentiellement cliniques de ces dernières années, principalement centrés sur la question de l’accomplissement de soi au travail.
Sous la direction de Maxime Quijoux, Presses universitaires de Rennes, 2015.