Le CHSCT de l’établissement Équipement de Juvisy/Brétigny a été réuni le 12 novembre 2014 pour rendre son avis sur le rapport d’expertise commandé par l’instance en juillet 2013 sur les causes de la catastrophe de Brétigny – qui avait causé la mort de sept personnes et fait de nombreux blessés. À l’unanimité, les représentants du personnel au CHSCT ont adopté une résolution du CHSCT reprenant dans son intégralité les recommandations contenues dans ce rapport. La cabinet APTEIS pointe de graves défaillances dans la sécurité ferroviaire et la responsabilité de la direction.
Un constat alarmant pour la sécurité ferroviaire
L’expertise CHSCT de 272 pages analyse de manière très précise l’organisation du travail des cheminots de l’Équipement qui assurent au quotidien l’entretien des voies, leurs contraintes et les choix faits par la direction SNCF au niveau national sur fond de « gains de productivité » et de coupes budgétaires. Ont ainsi été mises en relief :
– la baisse drastique des effectifs pour l’entretien du réseau ferré depuis 2000, puisque les effectifs de la branche Infrastructure (Équipement) ont diminué de plus de 6 000 agents, soit une réduction moyenne de 1,5% par an. Avec une baisse plus accentuée à la voie, soit 20% d’effectifs en moins sur 10 ans. Cette baisse se traduit sur l’établissement concerné par un passage de 150 à 43 agents entre 1985 et 2013 sur le secteur Brétigny-Étampes ; il en est de même pour le seul secteur de Brétigny qui a vu fondre ses effectifs de 48 à 22 agents sur la même période.
– une maintenance des voies qui n’est plus suivie correctement, puisque la mission des agents de la Voie s’est décentrée vers une maintenance dans l’urgence au fur et à mesure de la dégradation de l’état du réseau. Cette dégradation avait pourtant été mise en avant en 2005 par le rapport Rivier, mais la direction SNCF ne l’a pas suivi.
– une dégradation accélérée du réseau ferré dans la mesure où le renouvellement des voies est passé de 1000 km de voies par an jusqu’à 2005, à 500 km par an depuis cette date. C’est donc l’inverse de ce que prévoyait l’audit de l’école polytechnique de Lausanne.
– une organisation du travail détériorée par une réduction des effectifs, en dépit d’une augmentation des circulations. Cette politique du chiffre de la direction Nationale de la SNCF est directement mise en cause dans ce rapport.
La catastrophe de Brétigny : le résultat d’une politique nationale de maintenance.
Le rapport d’expertise pointe que les causes de la catastrophe de Brétigny ne sont pas une exception, ni du point de vue de l’organisation du travail et de ses contraintes, ni du point de vue du quotidien des situations de travail à la Voie, ni même du point de vue de l’appréhension des agents quant à la survenue prochaine d’un accident.
Cet accident a créé un traumatisme profond dans l’esprit des cheminot-es de tous les services de la SNCF, laissant planer une appréhension forte quant au risque de la survenue d’une nouvelle catastrophe comme cela a pu se produire en juillet 2014 à Denguin dans les Pyrénées-Atlantiques, un an après Brétigny.
La contre-offensive de la direction SNCF
La direction SNCF a essayé de botter en touche, jugeant les chiffres donnés dans le rapport d’expertise comme « très parcellaires » alors que ce sont ceux qu’elle a elle-même fournis aux experts. Le président de la SNCF, Guillaume Pépy, – mercenaire d’État – a prétendu qu’il s’agissait d’un « rapport des syndicats » pour décrédibiliser les conclusions accablantes du rapport.
La fédération SUD-Rail rappelle qu’il faut tirer les conclusions de ce drame : ce ne sont pas les cheminot-es qui travaillent quotidiennement dans des conditions de plus en plus difficiles qui doivent êtres pointé-es du doigt, mais les directions de la SNCF et de RFF.
C’est désormais à la justice, donc au tribunal d’Évry, de demander des comptes aux dirigeants de la SNCF et de RFF afin qu’ils assument la pleine responsabilité de leurs politiques mortifères de casse sociale.
Il faut redonner les moyens au service public ferroviaire et stopper la politique d’éclatement du système ferroviaire au risque de voir dans les années à venir une surenchère concurrentielle se faisant sur le dos de la sécurité des cheminot-es et des usager-es. C’est un choix politique, qui doit donc inverser cette politique de casse du service public ferroviaire.