Après les mobilisations contre la loi travail en 2016 puis celles contre les ordonnances travail courant 2017, la question du travail reste une question centrale pour le mouvement social et le fait d’avoir été pendant ces deux années plutôt sur des positions défensives ne nous a pas nécessairement permis de prendre (ou reprendre) la main sur ce sujet. A contrario, dans le quotidien de toutes et tous c’est le sujet qui mobilise les esprits, il y a donc bien une urgence pour le mouvement social à reconstruire une hégémonie culturelle sur le sujet « travail ».
C’est dans cet esprit que Solidaires a participé et co-organisé deux journées de débats et d’échanges autour du travail au cours du mois de janvier.
– « Les Assises pour la liberté du travail » qui se sont déroulées le samedi 13 janvier à la Bourse du Travail à Paris. Attac et la fondation Copernic à l’initiative de cette journée indiquaient : « Macron veut libérer le travail ? Nous aussi ! Mais nous voulons le libérer de l’emprise des actionnaires et des objectifs chiffrés. Lui redonner du sens. Conquérir le pouvoir d’agir sur comment et pourquoi nous travaillons. Rendre le travail vivable et soutenable, pour nous et pour la planète. … »
Les Assises pour la liberté du travail visaient donc à confronter ces initiatives et les renforcer, à partir de trois tables-rondes :
1) Résistance et pouvoir d’agir au cœur du travail réel
2) Qualité du travail, santé et écologie
3) Travail, entreprise et démocratie
Ces tables rondes qui ont réuni entre 300 et 400 personnes sur la journée ont permis des débats et confrontations d’idées autour de ces questions essentielles : s’agit-il de libérer le travail ou les travailleuses et travailleurs? Comment les organiser, s’organiser, face à ce capitalisme qui cherche à réduire les espaces de débats et à nier l’idée même de confrontation ? L’ensemble des interventions de cette journée est disponible ici
– Le 27 janvier toujours à la Bourse du Travail à Paris. se sont déroulées les rencontres « Tout le monde déteste le travail » pour qui en a, en cherche, l’évite, s’organise au delà.. Cette journée partait de l’idée que dans la plupart des langues le mot travail évoque la contrainte, la douleur, voire le chagrin ?
Et pourquoi tout l’art du management semble consister à rendre inaudible cette pourtant scandaleuse évidence : travailler revient toujours à se soumettre à une finalité étrangère, jamais à la nôtre ? Il s’agissait d’interroger les formes actuelles du travail, les formes d’exploitation et les ressorts intellectuels ou techniques qu’elles utilisent et les formes d’organisations qui se construisent, s’élaborent et se mettent en place pour y faire face.
Cette journée « Tout le monde déteste le travail » a été un important succès avec une bourse du travail emplie à craquer, débordante avec tout au long de la journée entre 2 et 3000 personnes qui sont venues participer aux conférences, tables-rondes, ateliers graphiques, projections et débats organisés en simultanée dans toutes les salles de la bourse. Une rencontre avec des syndicalistes de Solidaires (Sud PTT, Sud LIDL, Asso), des collectifs comme le CLAP, Blabla gréve, des invités internationaux comme la campagne « Make amazon pay » ou Callum Cant initiateur du mouvement européen des livreurs à vélo, des chercheuses/chercheurs, économistes, activistes et écrivains, et enfin les camarades de la ZAD et des syndicalistes des Pays de Loire. (il est possible de visionner cette journée ici )
A travers ces deux journées ce sont des espaces de débat et réflexion qui se sont ouverts, à nous de nous en saisir et de les poursuivre. Les conséquences en terme d’outils à dispositions des salarié-es pour défendre leur santé et leurs conditions de travail après les lois régressives de 2016 et 2017 vont être considérables. Pour autant, les atteintes à la santé, les risques physiques et psychiques n’iront pas en diminuant, bien au contraire, il est donc vital de construire de nouvelles stratégies, de nouvelles alliances pour y faire face. Cela sera un des objectifs des nouveaux états généraux de la santé des travailleuses et des travailleurs auxquels Solidaires participera en mai 2018. Plus que jamais, ne plus perdre sa vie à la gagner est un enjeu essentiel.