Après les annonces fracassantes du président de la République qui martelait « nous sommes en guerre », le ministère de l’Intérieur, celui du Travail et toute l’équipe gouvernementale opèrent un retournement de situation par des injonctions au travail et à maintenir l’économie et l’activité des entreprises avec à la clé un chantage au bénéfice du chômage partiel. C’est le cas pour de nombreux secteurs et en particulier le bâtiment et les travaux publics.
Ces injonctions sont reprises par la direction générale du travail et les DIRECCTE et visent à faire obstacle aux dangers graves et imminents (DGI) qui se multiplient dans les entreprises. Cette trame peut être utilisée à l’occasion d’un DGI, par un courrier à la Direction qui permet de laisser des traces.
Pour formaliser un DGI quelques éléments dans cette note élaborée avec SUD Travail. Elle peut être appuyée par une série de droits de retraits qu’il serait nécessaire de « couvrir » par des droits d’alertes complémentaires.
En rose : commentaire de Solidaires
En noir : proposition d’écriture du DGI
En vert : des passages particuliers en fonction des situations
Xx : à vous de compléter
1. Revenir dans un préambule sur le contexte et formaliser le danger
Depuis le 14 mars 2020, nous sommes en phase 3 de l’épidémie de COVID-19. Des mesures de restriction des déplacements et des contacts sociaux ont été arrêtées sur tout le territoire national dès le dimanche 15 mars et le président de la République a appelé à un confinement massif des personnes chez elles, interdisant tout rassemblement sous peine d’amendes.
Les tests de COVID-19 ne sont assurés que pour le personnel soignant et chaque personne peut être porteuse du virus dans la mesure où les symptômes sont aléatoires d’une personne à l’autre. Ces mesures de restriction ont été prises pour limiter la propagation du virus et permettre aux institutions médicales de gérer la crise sanitaire en traitant les malades les plus graves.
Des secteurs dont l’activité reste impérative pour le fonctionnement de la nation ont été listés de manière exhaustive.
- [notre entreprise/secteur d’activité] n’a pas été classée en secteur essentiel à ce jour et n’a pas d’obligation de poursuivre son activité.
- Notre entreprise fait partie des secteurs prioritaires qui doivent maintenir leur activité.
- Notre entreprise [est classée Seveso Seuil haut], présente un risque industriel/environnemental majeur sur le département…
Nous vous avons alerté le (xxx date) des risques liés au COVID-19. Ces risques sont multiples et il s’agit d’évaluer les risques de contamination des travailleurs et aussi la portée globale de l’épidémie de COVID-19 sur notre activité. Sont à évaluer aussi, les autres risques dans l’entreprise, notamment avec l’évolution des effectifs suite à cette épidémie (malades, personnes à risques, etc.).
À ce jour, vous n’avez rien fait/ou avez seulement rappelé l’obligation de maintenir les gestes barrières et une distance entre les personnes/ou avez pris des mesures insuffisantes pour prévenir les risques/ou avez essentiellement reporté sur les salarié·es les mesures à prendre.
L’activité se poursuit pleinement/en partie et de nombreux salarié·es sont exposé-es à des risques de contamination du fait de la carence/ou du fait de vos insuffisances de décisions et de vos obligations en matière de protection de la santé.
Il y a un danger d’exposition au virus qui ne souffre d’aucune contestation compte tenu des annonces gouvernementales et de la crise de santé publique puisque toute personne est susceptible d’être porteuse du virus aujourd’hui. Les échanges au sein du CSE doivent donc porter précisément sur le moyen de faire cesser ce risque.
2. Référence juridique à l’obligation d’évaluation des risques et de prendre des mesures adaptées
Nous vous rappelons que lorsque le résultat de l’évaluation des risques révèle l’existence d’un risque, il appartient à l’employeur de prendre toutes les mesures propres à préserver la santé et la sécurité des travailleurs en évitant l’exposition et, lorsque celle-ci ne peut être évitée, en adaptant notamment l’organisation et les processus de travail dans le respect des principes généraux de prévention (article L. 4121-2 du Code du travail).
Les représentants du personnel au CSE alertent, en application de l’article L. 4131-2 du Code du travail sur la situation créée par l’absence de concertation et de mesures prises sur les risques liés au COVID-19. Tous les salarié·es de l’entreprise sont concerné-es par la situation. Le document unique d’évaluation des risques doit être actualisé et les mesures de prévention anticipées. Dans la situation présente, les droits de retrait que peuvent décider des salarié·es seraient pleinement légitimes en application de l’article L. 4131-3 du Code du travail.
Nous vous rappelons que cette alerte nécessite de procéder immédiatement à une enquête avec les représentant·es du personnel au CSE à l’origine de cette procédure. En cas de divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, le CSE doit être réuni dans les 24h.
3. Les constats les risques et les exigences de situations dangereuses
Représentant-es du personnel au CSE nous avons constaté des situations exposant les travailleurs à un danger grave et imminent et qui ont justifié/qui peuvent justifier l’usage de leur droit de retrait.
Le constat doit reprendre :
- Le constat : date, lieu, nombre de personnes, situation de fait
- L’identification des problèmes et les insuffisances de l’employeur
- L’absence de prescrit ou son non-respect ou l’impossibilité d’appliquer les consignes
Pour chaque risque c’est au choix on peut en avoir un seul, plusieurs ou tous. De la même manière les arguments justifiants ces risques se cumulent, mais il n’est pas nécessaire de cocher toutes les cases pour lancer un DGI il en suffit d’une.
Il n’y a pas assez de demandes dans les DGI, il faut demander l’arrêt du travail quitte à revenir plus tard en CSE sur cette position. Il ne faut pas seulement dénoncer il faut demander, exiger et se positionner.
a) Risque lié à la présence d’un ou plusieurs cas de COVID-19 dans l’effectif
Le xxxx nous avons été informé que monsieur xxx, qui travaille au service xxx avait été touché par le virus COVID-19 après réalisation d’un test/ou a ressenti les symptômes du COVID-19.
Monsieur x a été en contact avec directe avec plusieurs salariés dont, à notre connaissance :
Madame xxx
Monsieur xxxx
Ces salariés ont été eux-mêmes en contact avec d’autres salariés et ce sont les services suivants qui sont concernés : xxxxx
Aucune disposition n’a été prise pour renvoyer à leur domicile les personnes qui ont été en contact avec ces personnes. Vous avez laissé le virus se propager de manière certaine sans respecter les mesures de veille de l’épidémie et tous les salariés des services précédents sont maintenant susceptibles d’être porteurs du virus. Aucun diagnostic précis du nombre de personnes concernées n’a été élaboré.
Nous demandons l’élaboration d’un diagnostic précis retraçant les contacts des diverses personnes, et la fermeture des services précités pour limiter la propagation du virus COVID-19 et éviter d’exposer les autres salariés.
b) Risque d’exposition du fait du nombre de personnes présentes sur les lieux de travail
Le xxxx nous avons constaté la présence de x personnes dans le local de travail xxx soit une pièce de x mètres carrés travaillant côte à côte.
Le xxxx nous avons constaté la présence de x personnes dans les couloirs, ascenseurs, escaliers, à la badgeuse lors de la rotation de poste à xx heures.
Le xxx nous avons constaté xxx personne en salle de repos, dans les locaux vestiaires ou les casiers ne sont espacés que de 50 cm, dans le local de restauration, au poste de garde, local fumeur… dans une promiscuité incompatible avec la prévention de la propagation du virus.
Le xxxx il y avait xxx clients dans le magasin et le service caisse a reçu xxx client à moins en contact quasi direct à moins d’un mètre.
Le xxx nous avons constaté dans le local xxx que des salariés d’entreprises extérieurs intervenaient en co-activité à proximité des salarié·es de notre entreprise sans précaution particulière
Il n’y a aucune impossibilité pour les personnes des services xxx de travailler en télétravail et d’éviter de se rendre dans les locaux.
Aucune disposition/ou pas suffisante, n’a été prise pour réduire l’effectif des salariés présents malgré l’ordre de confinement.
Aucune disposition/ou pas suffisante n’a été prise pour organiser une rotation du personnel sur le lieu de travail quand une présence est impérative afin de limiter le nombre de personnes sur site.
Aucune disposition/ou pas suffisante n’a été prise pour limiter le nombre de clients dans le magasin.
Aucun plan de continuité d’activité ou un document creux et sans mesures concrètes n’a été présenté au CSE avec mise à jour de l’évaluation des risques dans le DUER en indiquant :
- les services qui ne sont pas nécessaires et qui doivent fermer pour limiter la présence du personnel sur site,
- les personnes placées en télétravail pour limiter la présence sur site et respecter le confinement,
- les plannings de rotation des effectifs par service quand le service est appelé à continuer à tourner,
- les mesures d’organisation prise pour les locaux du personnel, salles de restauration,
- les mesures prises pour gérer les flux et circulation de personnel dans l’entreprise y compris aux prises de postes,
- les mesures prises pour limiter le nombre de travailleurs des entreprises extérieures sur site
Il n’y a pas eu de mise à jour des plans de prévention des entreprises extérieures.
Nous demandons la fermeture des services suivants jusqu’à la mise en œuvre des mesures d’organisation adaptées visant à limiter le nombre de personnes sur site et la présentation en CSE du DUER présentant une évaluation des risques par unité de travail sur la continuité d’activité et l’élaboration d’un plan de continuité d’activité.
Nous demandons l’interdiction d’accès aux entreprises extérieures suivantes… Jusqu’à prise en compte de leur activité dans le plan de continuité d’activité après une évaluation des risques liés à leur présence et mise à jour des plans de prévention.
c) Risque d’exposition dû à l’absence de mesure d’organisation et de moyen de prévention à disposition
Le xxx nous avons constaté que les salariés du service xxx intervenaient à proximité les uns des autres ou en contact de clients :
- sans équipement de protection, masques de protection, gants, vêtement de travail/ou avec des équipements inadaptés,
- sans eau à proximité pour se laver les mains, ni savon, ni moyen de séchage, ni gel hydroalcoolique à disposition,
- sans moyens ni procédure de nettoyage des équipements ou du poste de travail,
- sans respect des distances de sécurité/ou sans possibilité de respect,
- sans information sur le risque du COVID 19 et les gestes barrières.
Nous demandons la fermeture des services suivants jusqu’à la mise à disposition de moyens de prévention collectifs et individuels à disposition et une information adaptée.
Idem entreprise extérieure.
d) Risque d’exposition du fait du travail dans une autre entreprise
Les salariés intervenants dans l’entreprise xxx nous font part des éléments suivants : reprendre les deux parties du dessus, mais en version on subit l’absence de plan de continuité de l’entreprise d’accueil et l’absence de mise à jour des plans de prévention.
Nous demandons que les salariés n’interviennent plus dans l’entreprise xxx compte tenu du risque auquel ils sont exposés.
e) Risques liés à la baisse d’effectif due à l’épidémie
Du fait de l’épidémie et des absences de personnel pour garde d’enfant, maladie, suspicion d’exposition au virus et congé, nous avons constaté le xxx qu’il n’y plus que xxx personne dans le service xx.
Il n’y a plus assez de personnes pour assurer les procédures de sécurité, pour prévenir les risques de xxxxx, pour assurer les procédures d’urgence et d’évacuation…
Il n’y a pas eu de mise à jour ni d’évaluation des risques dans le DUER sur ce point indiquant le seuil critique en dessous duquel il n’est plus possible de maintenir une activité en sécurité.
Aucun document ne présente un seuil critique d’arrêt d’activité pour chaque unité de travail afin de préserver la santé et la sécurité.
Nous demandons la fermeture des services xxx.
4. Les éléments aggravants
Au choix selon la situation
Le danger que nous décrivions est sensiblement aggravé du fait :
a) De l’absence de contrôle et de présence des institutionnels sur le site
Le xxx nous avons constaté que le médecin du travail n’est plus disponible pour les visites à la demande, pour les visites de reprises.
Il n’y a plus assez de sauveteurs-secouristes dans l’entreprise.
Le responsable santé et sécurité n’est plus accessible dans l’entreprise, car il est placé en télétravail.
b) De l’absence de diagnostic de la situation sur le nombre de cas de COVID-19
Vous n’avez présenté aucun diagnostic de la situation au CSE comprenant :
- la localisation et le nombre de cas avérés de malades,
- le nombre de cas déclarant présenter des symptômes et invités à rester confinés chez eux,
- les mesures prises envers les salariés en contact avec ces personnes,
- le nombre de cas chez les clients où nous travaillons,
- le nombre de cas au sein des entreprises extérieures qui interviennent dans nos locaux.
Nous demandons la présentation de ce diagnostic exhaustif, et en cas de COVID-19 avéré la fermeture des services concernés.
c) De l’absence d’information adaptée à la situation
Il vous appartient de dispenser une information claire à l’ensemble des travailleurs sur le risque de COVID-19 en précisant :
Pour les personnes fragiles identifiées par le haut conseil de la santé publique la procédure d’autodéclaration en arrêt maladie sur le site Amélie, declare.ameli.fr, qui concerne :
- les femmes enceintes,
- les personnes atteintes de maladies respiratoires chroniques (asthme, bronchite chronique…),
- les personnes atteintes d’insuffisances respiratoires chroniques,
- les personnes atteintes de mucoviscidose,
- les personnes atteintes d’insuffisances cardiaques (toutes causes),
- les personnes atteintes de maladies des coronaires,
- les personnes avec antécédents d’accident vasculaire cérébral,
- les personnes souffrant d’hypertension artérielle,
- les personnes atteintes d’insuffisance rénale chronique dialysée,
- les personnes atteintes de diabète de type 1 insulinodépendant et de diabète de type 2,
- les personnes avec une immunodépression atteintes de pathologies cancéreuses et hématologiques, ou ayant subi une transplantation d’organe et de cellules souches hématopoïétiques,
- les personnes avec une immunodépression atteintes de maladies inflammatoires et/ou auto-immunes recevant un traitement immunosuppresseur,
- les personnes avec une immunodépression infectées par le VIH,
- les personnes atteintes de maladie hépatique chronique avec cirrhose,
- les personnes présentant une obésité avec un indice de masse corporelle (IMC) égal ou supérieur à 40.
Or nous avons constaté que des personnes fragiles sont encore présentes dans l’entreprise et sont exposées au virus.
Pour les personnes qui ressentent les symptômes ainsi que pour les personnes qui ont été en contact avec elles, la procédure de mise à l’arrêt immédiat du travail et de confinement à leur domicile avec maintien de leur salaire, ce renvoi soudain étant lié à une mesure d’éloignement sur décision de l’employeur au regard de ses obligations, jusqu’au placement du salarié en maladie ou, le cas échéant, en chômage partiel en précisant les conditions de rémunération sous cette mesure.
Pour toutes personnes, une information précise des symptômes et des gestes barrières à mettre en œuvre au quotidien.
Nous demandons à l’employeur de dispenser l’information adaptée concernant ce risque.
5. Éléments allant dans le sens des demandes
Au choix selon la situation
Nous vous rappelons que ce danger a été sérieusement identifié par :
- L’inspection du travail qui a rappelé vos obligations en la matière par courrier du xxx
- La fédération professionnelle de notre secteur d’activité qui appelle à prendre des mesures drastiques que vous ne respectez pas.
- Les autres entreprises du secteur ont déjà pris des mesures de fermeture à l’image de xxxx
De plus nous vous rappelons que :
- Rien ne justifie la continuité de notre activité ou du service qui n’est pas indispensable pour le fonctionnement de la nation.
- Qu’il existe un dispositif de chômage partiel qui fonctionne de manière rétroactive pour limiter la propagation du virus. Dans cette hypothèse, nous exigeons le maintien total des salaires.
- La continuité de notre activité ne peut passer faire au détriment de la santé des travailleurs exposés à un risque d’exposition au COVID-19 ou exposés à un plus grand risque encore au regard de ce que nous avons énoncé.
6. En conclusion
En conclusion des constats précédents nous notifions le présent danger grave et imminent car :
- vous ne prenez pas la mesure de la situation ;
- vous ne respectez pas vos obligations de sécurités et de protection de la santé des travailleurs ;
- la poursuite de l’activité dans ces conditions génère une propagation rapide du virus au sein des travailleurs. Il y a danger pour la santé des travailleurs de l’entreprise.
Pour protéger la santé des travailleurs, nous demandons la fermeture sans délai de l’entreprise ou des services suivants :
- Expédition
- Caisse magasin
- Premier étage…
Date :
Lieu :
Nom des signataires :
Signatures (du ou des élus CSE)