« Notre santé n’est pas à vendre »

capitalistesDans les années 1970 ce slogan était porté par la lutte des ouvriers des usines Penarroya d’abord à Saint Denis puis à Lyon, une lutte à bien des égards exemplaires tant dans les formes d’organisation collective que par la population concernée. Exemplaire aussi et surtout par le cœur de cette lutte, la défense de la santé des travailleurs de ces usines par les travailleurs eux-mêmes et avec le soutien de médecins, experts, chercheurs, tous unis pour soutenir les ouvriers scandant « nous réclamons le droit de vivre » et ancrer cette action dans la durée.

Depuis le début de cette année, Solidaires s’est engagé avec de nombreux acteurs de la santé des travailleuses et travailleuses dans la construction d’un collectif  initié par l’appel « Pour ne plus perdre sa vie à la gagner ». Celui-ci réuni à la fois des syndicalistes, des inspecteurs du travail, des chercheurs, médecins, associations, experts, etc. Il a été à l’initiative ces derniers mois d’une pétition, d’un meeting unitaire, de tribunes contre les dangers contenus aussi bien dans la loi Macron que dans la loi Rebsamen mais aussi de deux journées de préparation des états généraux de la santé des travailleuses et des travailleurs. Notre collectif s’attache à deux objectifs, à la fois combattre et mettre en lumière les dangers qui pèsent sur les outils de défense des salarié-es mais aussi consolider et armer un cadre unitaire porteur de revendications concrètes et acteur de la construction d’un système différent.

Il s’agit d’enjeux majeurs pour le mouvement social qui fait face à une offensive idéologique généralisée contre le monde du travail. La diffusion dans l’opinion publique de cette offensive par les médias dominants  (avec une prise en main de plus en plus assumée et affirmée par les capitalistes) tend à la banalisation d’un certain nombre de lieux communs qui joue en notre défaveur. Cela aboutit à un discours convenu auquel une large part de la population finit par consentir : le droit du travail est lourd d’un « formalisme inutile », synonyme d’inefficacité, qui entrave la « liberté d’entreprendre » et justifie la volonté gouvernementale de « simplifier » en période de « crise ».  Le lapin finirait presque par tenir le fusil du chasseur.

Face à cela, deux exigences temporelles à tenir ensemble :
– Une problématique immédiate : faire face aux projets de loi régressifs contre la protection de la santé des travailleurs, aux tentatives pour attaquer le code du travail et s’unir dans la défense de chacun des maillons de la prévention.
– Une problématique de plus long terme : relier les différents combats pour la santé au travail, développer et mobiliser des connaissances et des actions pour faire entrer les questions de santé au travail dans le débat public.

Dans ce cadre, nous participerons aux mobilisations en cours de construction pour défendre le code du travail après le rapport Combrexelle qui s’inscrit  dans la poursuite de l’inversion de la hiérarchie des normes en ouvrant largement le champ de la négociation dans les entreprises et en privilégiant les accords d’entreprise au détriment des droits collectifs fixés par la loi, y compris sur les conditions de travail. De ce fait c’est augmenter les inégalités entre les travailleuses et les travailleurs selon leur lieu de travail, sa taille, les rapports de force. Dans un contexte de crises c’est renforcer le chantage pour les seuls intérêts du patronat et entretenir la confusion sur des prétendus intérêts communs alors qu’il ne s’agit que d’entériner des reculs sociaux.

Le rapport Combrexelle c’est aussi la tarte à la crème de la simplification nécessaire du code du travail, non pas pour supprimer les nombreuses exonérations et exemptions au profit des patrons mais surtout pour réduire les droits collectifs des travailleuses et travailleurs.
C’est la suite logique pour celui qui a tout fait pour démanteler les services de l’inspection du travail. C’est aussi pour défendre l’inspection du travail que nous serons nombreux à Annecy le 16 octobre pour dénoncer les poursuites honteuses lancées à la fois contre les syndicalistes de Tefal et l’inspectrice du travail, Laura. Nous lutterons pied à pied pour garantir les droits des travailleuses et des travailleurs.

Nous poursuivrons dans le même temps notre engagement pour la construction des Etats Généraux de la santé des travailleuses et des travailleurs que nous souhaitons voir organisés au début de l’année 2016. Pour se faire Solidaires mettra les moyens nécessaires pour y parvenir et mobilisera ses réseaux.  Nous souhaitons poursuivre l’élargissement de ce réseau et avoir la participation de nombreux collectifs militants de terrain.

Nous voulons participer à la réflexion sur un nouveau système de prévention de la santé au travail, au delà des luttes concrètes qui restent souvent défensives. Les Etats Généraux que nous envisageons doivent permettre de nous projeter vers un système différent.

Nos Etats généraux doivent être à la fois lieu de rencontre et moment de mobilisation. Inspirons nous des luttes passées pour construire l’avenir et pour ne plus perdre sa vie à la gagner.

Pour plus de détails sur la lutte des «Penarroya » nous vous recommandons l’excellent article de Laure Pitti paru dans la revue Plein droit du Gisti en libre accès ici.