FICHE N° 24
L’expertise du CSE en santé, sécurité et conditions de travail

Cette fiche a une vocation volontairement informative qui se limite à présenter uniquement l’expertise du CSE en matière de santé et de sécurité au travail. Elle permet cependant de se rendre compte que le recours à l’expertise va être rendu beaucoup plus contraint (délais et prise en charge financière réduits…) ce qui nécessitera vraisemblablement de la part des équipes syndicales de s’interroger sur la nature des expertises à engager et à privilégier.
Les éléments contenus dans la fiche n° 5 (novembre 2017) et tout particulièrement ce qui concerne la stratégie syndicale gardent toute leur pertinence. Cette fiche a pour objet de préciser les possibilités et les modalités de recours à l’expertise pour le comité social et économique (CSE) nouvelle instance qui va se substituer aux actuelles institutions représentatives que sont les DP, les CE et les CHSCT d’ici le 1er janvier 2020.
Ces modifications ne concernent que les entreprises d’au moins 50 salarié·e·s. Elles sont entrées en vigueur au 1er janvier 2018 sauf en ce qui concerne l’habilitation des experts qui elle entrera en application au 1er janvier 2020.

1 – Les conditions de recours à une expertise

La loi prévoit désormais le recours à deux catégories d’experts : les experts comptables (partie non traitée dans cette fiche) et les experts habilités.
Il est à noter que la loi ne parle plus d’expert agréé mais d’expert habilité (se reporter au § V).

1.1 Tous les CSE

Cette possibilité est ouverte à tous les CSE (c’est-à-dire quel que soit leur nombre de salarié-es) dans les situations suivantes :
– en cas de risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel ;
– en cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail.

1.2 Et aux CSE d’au moins 300 salarié·e·s

– Pour préparer la négociation sur l’égalité professionnelle.

Article L 2315-94 « Le comité social et économique peut faire appel à un expert habilité dans des conditions prévues par décret en Conseil d’Etat :
1° Lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement ;
2° En cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévus au 4° de l’article L 2312-8 ;
3° Dans les entreprises d’au moins trois cents salariés, en vue de préparer la négociation sur l’égalité professionnelle.
»

La décision de faire appel à un expert est de la seule compétence du CSE, les commissions créées peuvent seulement le proposer.

2 – Les délais entourant l’expertise

Le CSE reste libre du choix de l’expert, il peut établir un cahier des charges, ce n’est donc pas une obligation. Mais s’il le fait celui-ci doit être notifié à l’employeur. Les textes n’en disent pas plus.

L’expertise est encadrée par des délais très stricts

– L’expert a 3 jours pour demander toutes les informations complémentaires à l’employeur, ce dernier devant répondre dans les 5 jours.
– Il dispose de 10 jours pour communiquer à l’employeur le coût prévisionnel, l’étendue et la durée de l’expertise.

Article L 2315-81-1 « A compter de la désignation de l’expert par le comité social et économique, les membres du comité établissent au besoin et notifient à l’employeur un cahier des charges. L’expert notifie à l’employeur le coût prévisionnel, l’étendue et la durée d’expertise, dans un délai fixé par décret en Conseil d’Etat. »

Article R 2315-45 « L’expert demande à l’employeur, au plus tard dans les trois jours de sa désignation, toutes les informations complémentaires qu’il juge nécessaires à la réalisation de sa mission. L’employeur répond à cette demande dans les cinq jours. »

Article R 2315-46 « L’expert notifie à l’employeur le coût prévisionnel, l’étendue et la durée d’expertise dans un délai de dix jours à compter de sa désignation. »

– L’expert remet son rapport dans un délai maximal fixé par accord collectif d’entreprise ou accord conclu entre l’employeur et le CSE.
En l’absence d’accord, le rapport doit être remis dans les 2 mois de sa désignation, ce délai pouvant être prolongé. S’il s’agit d’une consultation, l’expert rend son rapport au plus tard 15 jours avant l’expiration des délais de consultation du CSE. S’il s’agit d’une opération de concentration, l’expert remet son rapport dans le délai de 8 jours à compter de la notification de la décision de l’Autorité de la concurrence ou de la Commission européenne saisie du dossier.

– Si l’expertise porte sur plusieurs domaines, le rapport est unique.

Article L 2315-85 « Un décret en Conseil d’Etat détermine :
1° Pour chaque catégorie d’expertise, le délai maximal dans lequel l’expert remet son rapport, en l’absence d’accord d’entreprise ou d’accord conclu entre l’employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires de la délégation du personnel du comité, le définissant ;
2° Les modalités et conditions de réalisation de l’expertise, lorsqu’elle porte sur plusieurs champs.
»

Article R 2315-47 « L’expert remet son rapport au plus tard quinze jours avant l’expiration des délais de consultation du comité social et économique mentionnés aux second et troisième alinéas de l’article R. 2312-6.
Lorsque le comité social et économique recourt à un expert- comptable dans le cas prévu au 1° de l’article L 2315-92, l’expert remet son rapport dans un délai de huit jours à compter de la notification de la décision de l’Autorité de la concurrence ou de la Commission européenne saisie du dossier.
A défaut d’accord d’entreprise ou d’accord entre l’employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel, lorsque le comité recourt à une expertise en dehors des cas prévus au premier et au second alinéas du présent article, l’expert remet son rapport dans un délai de deux mois à compter de sa désignation.
Ce délai peut être renouvelé une fois pour une durée maximale de deux mois, par accord entre l’employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires élus de la délégation du personnel.
»

Article R 2315-48 « Lorsque l’expertise prévue au 2° de l’article L 2315-85, porte sur plusieurs champs, elle donne lieu à l’établissement d’un rapport d’expertise unique.
L’expert désigné par le comité social et économique peut s’adjoindre la compétence d’un ou plusieurs autres experts sur une partie des travaux que nécessite l’expertise.
L’expert désigné vérifie alors que ces derniers disposent des compétences nécessaires au bon déroulement de la mission d’expertise ou, le cas échéant, de l’habilitation prévue à l’article L 2315-96.
»

3 – La contestation de l’expertise

L’employeur qui entend contester nécessité de l’expertise, le choix de l’expert, le coût prévisionnel, l’étendue et la durée ainsi que le coût définitif saisit le tribunal de grande instance (TGI) dans le délai de 10 jours :
– à compter de la délibération du CSE s’il entend contester la nécessité de l’expertise,
– de la désignation de l’expert par le CSE s’il entend contester le choix de l’expert,
– de la notification à l’employeur du cahier des charges s’il entend contester la durée, l’étendue ou le coût prévisionnel de l’expertise
– de la notification à l’employeur du coût final de l’expertise s’il entend contester son coût.

Le TGI statue en la forme des référés en premier et dernier ressort dans les 10 jours de la saisine. Pendant ce délai la décision du CSE est suspendue ainsi que les délais de durant lesquels il est consulté.

Si l’expertise est annulée définitivement par le juge, l’expert doit rembourser l’employeur, le CSE pouvant décider de prendre en charge le remboursement.

Le délai pour se pourvoir en cassation est de 10 jours à compter de la notification du jugement.

Article L 2315-86 « Sauf dans le cas prévu à l’article L. 1233- 35-1, l’employeur saisit le juge judiciaire dans un délai fixé par décret en Conseil d’Etat de :
1° La délibération du comité social et économique décidant le recours à l’expertise s’il entend contester la nécessité de l’expertise ;
2° La désignation de l’expert par le comité social et économique s’il entend contester le choix de l’expert ;
3° La notification à l’employeur du cahier des charges et des informations prévues à l’article L. 2315-81-1 s’il entend contester le coût prévisionnel, l’étendue ou la durée de l’expertise ;
4° La notification à l’employeur du coût final de l’expertise s’il entend contester ce coût ;
Le juge statue, en la forme des référés, en premier et dernier ressort, dans les dix jours suivant sa saisine. Cette saisine suspend l’exécution de la décision du comité, ainsi que les délais dans lesquels il est consulté en application de l’article L. 2312- 15, jusqu’à la notification du jugement.
En cas d’annulation définitive par le juge de la délibération du comité social et économique, les sommes perçues par l’expert sont remboursées par ce dernier à l’employeur. Le comité social et économique peut, à tout moment, décider de les prendre en charge.
»

Article R 2315-49 « Pour chacun des cas de recours prévus à l’article L 2315-86, l’employeur saisit le juge dans un délai de dix jours. »

Article R 2315-50 « Les contestations de l’employeur prévues à l’article L 2315-86 relèvent de la compétence du président du tribunal de grande instance. Le délai du pourvoi en cassation formé à l’encontre du jugement est de dix jours à compter de sa notification. »

4 – La prise en charge financière de l’expertise

En totalité par l’employeur

En cas de risque grave pour la santé, la sécurité et les conditions de travail des salarié·e·s (1° L 2315-94), Lorsque le budget de fonctionnement du CSE est insuffisant pour couvrir sa part de 20 % et si ce budget n’a pas été excédentaire au cours des trois années précédentes.

En partie par l’employeur

Pour l’expertise en cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail l’employeur participera à hauteur de 80 % laissant les 20 % restant à la charge du budget de fonctionnement du CSE.

Article L2315-80 « Lorsque le comité social et économique décide du recours à l’expertise, les frais d’expertise sont pris en charge :
1° Par l’employeur concernant les consultations prévues par les articles L. 2315-88, L. 2315-91, au 3° de l’article L. 2315-92 et au 1° de l’article L. 2315-94 ainsi qu’au 3° du même article L. 2315-94 en l’absence de tout indicateur relatif à l’égalité professionnelle prévu à l’article L. 2312-18 ;
2° Par le comité, sur son budget de fonctionnement, à hauteur de 20 %, et par l’employeur, à hauteur de 80 %, concernant la consultation prévue à l’article L. 2315-87 et les consultations ponctuelles hors celles visées au deuxième alinéa ;
3° Par l’employeur concernant les consultations mentionnées au 2° du présent article, lorsque le budget de fonctionnement du comité social et économique est insuffisant pour couvrir le coût de l’expertise et n’a pas donné lieu à un transfert d’excédent annuel au budget destiné aux activités sociales et culturelles prévu à l’article L. 2312-84 au cours des trois années précédentes.
»

5 – L’habilitation des experts

Jusqu’à présent les experts CHSCT étaient agréés par le ministère du travail pour une durée de 1 à 5 ans. Il existait deux domaines d’agrément : santé et sécurité au travail et organisation de travail et production. L’habilitation va remplacer l’agrément à compter du 1er janvier 2020. Pour en savoir plus il faut attendre la publication de l’arrêté du ministère du travail.

Article R 2315-51 (différé) « L’habilitation de l’expert auquel le comité social et économique peut faire appel, en application de l’article L. 2315-94, est une certification justifiant de ses compétences. Cette certification est délivrée par un organisme certificateur accrédité par le comité français d’accréditation ou par tout autre organisme d’accréditation mentionné à l’article R 4724-1. »

Article R 2315-52 (différé) « Un arrêté du ministre chargé du travail détermine :
1° Les modalités et conditions d’accréditation des organismes mentionnés à l’article R 2315-51 ;
2° Les modalités et conditions de certification des experts mentionnées à l’article L. 2315-96, en tenant compte, notamment, de ses compétences techniques et du domaine d’expertise dans lequel il intervient.
»

Article R 4724-1 « Les accréditations sont délivrées par le Comité français d’accréditation ou par tout autre organisme d’accréditation désigné en application du règlement (CE) n° 765 / 2008 du Parlement européen et du Conseil du 9 juillet 2008 fixant les prescriptions relatives à l’accréditation et à la surveillance du marché pour la commercialisation des produits.
Un organisme d’un Etat membre de l’Union européenne non établi en France peut effectuer de façon occasionnelle des prestations de service mentionnées à l’article L 4722-1 s’il dispose d’une accréditation attestant qu’il a été reconnu compétent pour mettre en oeuvre toute méthode normalisée ou assimilée, applicable sur le territoire national, dans le domaine de compétence au titre duquel il intervient.
»