Focus sur une expérience dans un hôpital de l’APHP (Hôpitaux de Paris)

photos 23À l’APHP, il y a une trentaine de suicides sur 4 ans. Et cela ne se sait pas. Notamment, une collègue de l’hôpital pédiatrique s’est suicidée chez elle en marquant sur un petit bout de papier : « travail inhumain, je ne veux plus retourner à l’hôpital » ; c’était clair : cela était lié au travail. Les syndicats, le CHSCT, ont demandé une expertise qui a donné lieu à des recommandations.

Or, juste après les résultats de cette expertise, la direction a sorti un document préparatoire au projet de restructuration de la maternité : « Projet naissance ». Il y est fait état d’un nouveau métier qui n’existe pas, celui d’« auxiliaire de maternité ». A propos des métiers dans les hôpitaux, il y a actuellement les aides-soignantes (qui s’occupent plutôt des petits déjeuners, des désinfections, du ménage) et puis les auxiliaires de puériculture (qui s’occupent des mamans et des bébés).

Or, pour qu’il y ait une mobilité forcée et une polyvalence (tout cela est idéologique), le nouveau métier « auxiliaire de maternité » doit permettre de faire les 2 : à la fois du ménage et s’occuper des bébés. Les organisations syndicales ont dénoncé cela ; mais la direction a, malgré tout, sorti ce document de préparation au projet de restructuration.

Dans ce document, il y a le profil des agents. C’est-à-dire qu’il y a le nom des personnes : si elle est aide-soignante ou auxiliaire de puériculture, titulaire ou contractuelle, sa quotité de travail, l’organisation de travail… Y est associé aussi un  qui marque chaque agent dans l’une des catégories suivantes :
– leaders négatifs : emprise négative sur l’équipe, refus du changement, commérage, opposition à la hiérarchie ;
– comportements négatifs : souvent opposé au changement, effet négatif sur le climat social ;
– experts : ne sont pas des leaders mais ont une expertise du terrain, favorables au changement pour l’amélioration de la qualité, polyvalence ;
– sociables : respectent la hiérarchie et les consignes, ouverts aux échanges et aux propositions ;
– minorité silencieuse : ne prennent pas d’initiative, plus ou moins sous emprise des leaders négatifs.

Tout cela après le suicide d’une collègue, et alors qu’une expertise donne des recommandations… Ce document a été malencontreusement envoyé aux membres du CHSCT par courriel. La direction a ensuite essayé de récupérer les messages sur Outlook mais n’a pu le faire pour chaque destinataire.

Et tout cela sur fond de dialogue social prôné par la nouvelle direction (car suite au suicide évoqué, l’ancienne direction a été limogée) qui prétend qu’elle est ouverte, ainsi que le sont toutes les portes de groupes de travail. Or, même quand cette direction « ouvre les portes du dialogue social », il y a parfois des documents qui trainent qui permettent de se rendre compte qu’il y a des problèmes d’effectifs ; mais quand on lui demande, elle affirme qu’il n’y a aucun problème d’effectif…

C’est ça le dialogue social : la direction nous ouvre toutes les portes, mais si il n’y a pas des documents qui trainent pour nous montrer ce qu’il y a réellement, elle est prête à mentir pour nous faire croire des choses.

Par ailleurs, il y a toujours les entretiens individuels où l’on demande maintenant au personnel de l’hôpital de donner lui-même ses propres objectifs aux cadres, pour l’année, et de les tenir. On ne regarde pas s’il a les moyens matériels ou humains pour les atteindre.

Et enfin, quand on parle avec cet encadrement, on se rend compte que les cadres n’ont aucune culture syndicale, qu’ils ne connaissent ni leur droit, ni le droit syndical… sous couvert de primes au mérite en fonction des objectifs.

Voilà pour le focus sur ce qu’il se passe dans un hôpital pédiatrique à l’APHP.