Cette note a pour but de recenser rapidement les principales modifications (hors celles sur la médecine du travail et l’inaptitude reprises dans la fiche spécifique) apportées aux missions des CHSCT par les lois Rebsamen et El Khomri, toujours combattues et dénoncées par Solidaires !
1-La prévention d’agissement sexiste est intégrée aux missions du CHSCT
L’article L1142-2-1 du code du travail précise que « nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».
Les règles relatives à l’interdiction des agissements sexistes doivent figurer dans le règlement intérieur de l’entreprise.
La prévention de ce type d’agissements est intégrée aux missions du CHSCT au même titre que la prévention du harcèlement moral et du harcèlement sexuel. Article L4612-3
La protection contre les agissements sexistes est étendue aux fonctionnaires.
Le régime de la preuve du harcèlement moral et sexuel est aligné sur celui des discriminations : le-la salarié-e doit présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Article L1154-1.
Précédemment il fallait établir des faits permettant de présumer l’existence du harcèlement.
2- Un 21ème motif prohibé de discrimination en droit du travail
Il s’agit de « la particulière vulnérabilité résultant de la situation économique d’une personne » (Article L1132-1). Ce motif est également ajouté à l’article L1133-6 du code du travail pour autoriser la discrimination positive ainsi qu’à l’article 225-1 du code pénal.
3- L’élargissement des missions du CHSCT
Le CHSCT a désormais pour mission Article L4612-1 :
- de contribuer à la prévention (modification issue de la loi Santé) et à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l’établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure ;
- de contribuer à l’amélioration des conditions de travail, notamment en vue de faciliter l’accès des femmes à tous les emplois et de répondre aux problèmes liés à la maternité ;
- de contribuer à l’adaptation et à l’aménagement des postes de travail afin de faciliter l’accès des personnes handicapées à tous les emplois et de favoriser leur maintien dans l’emploi au cours de leur vie professionnelle ;
- de veiller à l’observation des prescriptions légales prises en ces matières.
Autres dispositions prévues pour les salarié-es handicapé-es :
- Si le temps de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail est majoré du fait d’un handicap, il peut faire l’objet d’une contrepartie sous forme de repos. Article L3121-5
- L’employeur s’assure que les logiciels installés sur le poste de travail des personnes handicapées et nécessaires à leur exercice professionnel sont accessibles. Il s’assure également que le poste de travail des personnes handicapées est accessible en télétravail. Article L5213-6. Cette disposition entrera en vigueur au plus tard au 8 août 2019.
4- Le CHSCT est informé de la visite de l’inspection du travail
Lors des visites de l’agent de contrôle de l’inspection du travail mentionné à l’article L. 8112-1, les représentants du personnel au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail sont informés de sa présence par l’employeur et peuvent présenter leurs observations. Article L4612-7
5- L’accès du CHSCT à la BDES
La base de données économiques et sociales (BDES) jusqu’à présent réservée au comité d’entreprise est désormais accessible dans les mêmes conditions au CHSCT. La BDES remplace les différents rapports et bilans que l’employeur était tenu de transmettre au CE (bilan social, rapport de situation comparée hommes/femmes, rapport sur la situation économique, etc.) Article L2323-8
Pour mémoire : les informations contenues dans la base de données portent sur un grand nombre de questions comme: les investissements dont « l’investissement social (emploi, évolution et répartition des contrats précaires, des stages et des emplois à temps partiel, formation professionnelle et conditions de travail) » ; « l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise » ; … la rémunération des financeurs ; les flux financiers à destination de l’entreprise, notamment les aides publiques et les crédits d’impôts ; la sous-traitance; le cas échéant, transferts commerciaux et financiers entre les entités du groupe.
Ces informations portent sur les deux années précédentes et l’année en cours et intègrent des perspectives sur les trois années suivantes.
Depuis le 1er janvier 2016 une nouvelle rubrique sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est ajoutée aux 8 rubriques existantes ; elle est organisée autour de 3 points :
- le diagnostic et analyse de la situation respective des femmes et des hommes pour chacune des catégories professionnelles de l’entreprise en matière d’embauche, de formation, de promotion professionnelle, de qualification, de classification, de conditions de travail, de sécurité et de santé au travail, de rémunération effective et d’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle ;
- l’analyse des écarts de salaires et de déroulement de carrière en fonction de l’âge, de la qualification et de l’ancienneté ;
- l’évolution des taux de promotion respectifs des femmes et des hommes par métiers dans l’entreprise.
La mise à disposition de ces documents vaut communication (Article L2323-9) et servira aux trois consultations annuelles obligatoires du CE: les orientations stratégiques, la situation économique et financière, la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi.
6- De nouveaux délais de consultation pour le CHSCT
Loi Rebsamen décret du 29 juin 2016
Sauf délais spécifiques prévus par la loi ou par un accord, les délais de consultation du CHSCT sont fixés ainsi :
- le CHSCT « est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif à l’expiration d’un délai d’1 mois à compter de la communication par l’employeur des informations prévues pour la consultation ou de l’information de leur mise à disposition dans la BDES.
- en cas de recours à un expert le délai est porté à 2 mois.
- si l’employeur ou le CE saisit un ou plusieurs CHSCT le délai est porté à 3 mois et à 4 mois si une ICCHSCT est mise en place à cette occasion que le CE soit ou non assisté d’un expert.
- L’avis du CHSCT est transmis au comité d’entreprise au plus tard sept jours avant la date à laquelle ce dernier est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif.
R4615-5-2 et R4615-5-3
- le délai de transmission au CHSCT de l’ordre du jour et des documents s’y rattachant est réduit de 15 à seulement 8 jours avant la réunion ! Article R 4614-3
Si l’on voulait empêcher les membres du CHSCT de travailler leurs dossiers on ne s’y prendrait pas autrement !
Il s’agit là d’une décision particulièrement scandaleuse qui va porter durablement atteinte à la qualité et au sérieux des travaux du CHSCT.
7- En cas d’annulation d’une expertise CHSCT, celle-ci ne sera plus payée par l’employeur. L4614-13
Si l’employeur entend contester la nécessité de l’expertise, la désignation de l’expert, le coût prévisionnel de l’expertise, l’étendue ou le délai de l’expertise votée par le CHSCT (ou l’ICCHSCT) il doit le faire dans le délai de 15 jours à compter de la délibération du CHSCT. Ce dispositif ne s’applique pas en cas de restructuration ou de compression des effectifs.
- La saisine du TGI suspend la décision du CHSCT jusqu’au jugement.
Lorsque le CHSCT et le CE sont saisis sur le même projet, la saisine suspend également les délais de consultation.
- le juge dispose de 10 jours pour statuer en référé en premier et dernier ressort. L’employeur peut ensuite contester cette décision devant la cour de cassation, mais la saisine n’est plus suspensive.
Les frais d’expertise demeurent à la charge de l’employeur sauf si celle-ci est annulée définitivement par le juge, l’expert doit alors rembourser l’employeur. Toutefois le CE peut décider prendre à sa charge ces frais.
Une autre insécurité va peser sur le CHSCT : la possibilité nouvelle donnée à l’employeur de contester le coût final de l’expertise devant le juge judiciaire, dans un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle l’employeur a été informé de ce coût. Article L4614-13-1
Article L4614-13 Modifié par LOI n°2016-1088 du 8 août 2016 – art. 31
Lorsque l’expert a été désigné sur le fondement de l’article L. 4614-12-1, toute contestation relative à l’expertise avant transmission de la demande de validation ou d’homologation prévue à l’article L. 1233-57-4 est adressée à l’autorité administrative, qui se prononce dans un délai de cinq jours. Cette décision peut être contestée dans les conditions prévues à l’article L. 1235-7-1.
Dans les autres cas, l’employeur qui entend contester la nécessité de l’expertise, la désignation de l’expert, le coût prévisionnel de l’expertise tel qu’il ressort, le cas échéant, du devis, l’étendue ou le délai de l’expertise saisit le juge judiciaire dans un délai de quinze jours à compter de la délibération du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou de l’instance de coordination mentionnée à l’article L. 4616-1. Le juge statue, en la forme des référés, en premier et dernier ressort, dans les dix jours suivant sa saisine. Cette saisine suspend l’exécution de la décision du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou de l’instance de coordination mentionnée à l’article L. 4616-1, ainsi que les délais dans lesquels ils sont consultés en application de l’article L. 4612-8, jusqu’à la notification du jugement. Lorsque le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou l’instance de coordination mentionnée au même article L. 4616-1 ainsi que le comité d’entreprise sont consultés sur un même projet, cette saisine suspend également, jusqu’à la notification du jugement, les délais dans lesquels le comité d’entreprise est consulté en application de l’article L. 2323-3.
Les frais d’expertise sont à la charge de l’employeur. Toutefois, en cas d’annulation définitive par le juge de la décision du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou de l’instance de coordination, les sommes perçues par l’expert sont remboursées par ce dernier à l’employeur. Le comité d’entreprise peut, à tout moment, décider de les prendre en charge dans les conditions prévues à l’article L. 2325-41-1.
L’employeur ne peut s’opposer à l’entrée de l’expert dans l’établissement. Il lui fournit les informations nécessaires à l’exercice de sa mission.
L’expert est tenu aux obligations de secret et de discrétion définies à l’article L. 4614-9.
8- Le CHSCT réuni par visioconférence
Le recours à la visioconférence est possible si un accord est conclu entre l’employeur et les membres du CHSCT. En l’absence d’accord, ce recours est limité à 3 réunions par année civile ! Article L4614-11-1
Le décret 2016-453 du 12 avril 2016 détermine les conditions dans lesquelles les IRP sont réunies en visioconférence : comité d’entreprise, comité d’établissement, comité central d’entreprise, comité de groupe, comité d’entreprise européen, comité de la société européenne, CHSCT, instance de coordination des CHSCT et institutions réunies en commun
Les réunions par visioconférence du CHSCT sont tenues dans les conditions prévues aux articles D. 2325-1-1 et suivants. Article D4614-5-1.