Ne pas réunir le CHSCT en cas d’accident grave est un délit d’entrave

A la suite de plusieurs incidents graves (menaces à l’encontre de conducteurs de bus) le secrétaire du CHSCT a demandé la convocation d’un CHSCT extraordinaire refusé à chaque fois par la direction qui estimait le CHSCT régulièrement et suffisamment informé des évènements.Face à cette attitude les syndicats et le CHSCT de l’entreprise ont décidé de poursuivre le président du CHSCT et l’entreprise (la RATP) pour délit d’entrave en invoquant l’article L4614-10 du code du travail : « Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail est réuni à la suite de tout accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves ou à la demande motivée de deux de ses membres représentants du personnel ».
Pour justifier sa position l’employeur fait valoir que les faits invoqués étaient des incidents et non des accidents, qu’il a mis en place un dispositif d’alerte, de protection et de prévention en cas de menace et d’agression et qu’en conséquence il a rempli son obligation de sécurité. La direction a également mis en avant le fait que le CHSCT avait été informé à postériori des différentes agressions et que comité s’est réuni 58 fois en 2012 et 53 fois en 2013.
Mais pour les juges de la cour de cassation qui se sont appuyés sur les articles du code du travail et sur les faits « l’employeur a commis le délit d’entrave caractérisé tant en son élément matériel qu’en son élément intentionnel… »
En outre les juges ont considéré que la transmission des seules conclusions (pour des raisons de confidentialité !) des différentes enquêtes faisant suite au déclenchement d’une alerte pour danger grave et imminent constituait un délit d’entrave. En effet ces rapports « portant sur des faits concernant la santé et la sécurité du personnel et qu’il appartient à l’employeur de donner au comité les informations nécessaires pour l’exercice de ses missions, les prévenus ont porté une atteinte au fonctionnement régulier du CHSCT dont les membres sont tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par l’employeur ».
Ce dernier point est important à souligner tant les directions (dans le privé comme dans le public) apportent des restrictions à la communication d’informations au CHSCT prétextant la confidentialité.

Cour d’appel de Paris n°15/02323 du 22 mars 2016