Maladies industrielles et mobilisations collective

Séminaire organisé par Pascal Marichalar (IRIS) et Laure Pitti (Cresppa-CSU)
Initié en 2010, ce séminaire de sciences sociales est un lieu d’échange autour des mobilisations collectives contre les maladies industrielles. Nous définissons ces dernières comme l’ensemble des affections néfastes pour la santé des travailleurs et des riverains qui résultent de certaines activités industrielles.

Une attention particulière est portée à la définition sociale de la santé et des maladies, aux conditions de possibilité des mobilisations et à la forme de ces dernières, à la construction politique d’une notion de risque « acceptable » et aux efforts pour la déconstruire, ainsi qu’aux interactions entre ce qui se passe dans et hors de l’usine. Des enquêtes sociologiques et historiques récentes ou en cours forment la base de la réflexion du séminaire, qui est ouvert à tous (notamment étudiants, enseignants-chercheurs, autres professions intéressées par ces questions).
L’atteinte à la santé du fait de l’exposition ou de l’utilisation de produits toxiques défraye périodiquement la chronique. L’affaire de l’amiante en est une illustration parmi d’autres. Elle permet de cerner immédiatement l’importance sanitaire de cette question traditionnellement classifiée dans le registre des CMR (cancérigènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction). A cela s’ajoute des risques relatifs aux conditions de travail en tant que tels : bruit, chaleur, risques liés aux machines, etc. Et l’on sait que si l’exposition des travailleurs à ces dangers industriels n’est pas à proprement parlé nouvelle, elle tend à être banalisée, voire justifiée, par le souci de rentabilité immédiate qui caractérise la mondialisation financière.
En appelant leur séminaire « Maladies industrielles et mobilisations collectives », les sociologues Pascal Marichalar et Laure Pitti pointent deux enjeux cruciaux qui intéressent la Commission santé et conditions de travail.
Le premier, politique, tient à la nécessité de contrer le déni institutionnel de l’ampleur des risques industriels. En nommant « maladies industrielles » les atteintes graves à la santé en lien avec le travail, c’est la responsabilité des employeurs qui est directement rappelée à l’encontre de leurs tentatives de « désengagement moral » (Pascal Marichalar). Ceux-ci, en effet, ne manquent jamais de justifier les conséquences néfastes de leurs activités en recourant au chantage à l’emploi ou à la délocalisation, en s’abritant derrière les niveaux (souvent permissifs) de seuil des expositions aux dangers, en cherchant à minimiser les risques au regard d’autres secteurs d’activité, voire de certaines situations quotidiennes (les accidents de la route, etc.), ou encore en présentant les lanceurs d’alertes comme des « agitateurs irresponsables ». Mais, cyniques, ces rationalisations sont mises à mal par ce questionnement opiniâtre avancé par Pascal Marichalar : « Quels sont les mécanismes sociaux qui conduisent à accepter d’exposer délibérément des salariés à des dangers graves, avérés et reconnus comme tels ? ».
Le deuxième enjeu consiste à définir les conditions de possibilité des « mobilisations collectives ». En effet, l’indignation ou la dénonciation ne suffit pas à expliquer, comme l’indique Laure Pitti, quels acteurs sont prêts à se mobiliser et pourquoi. Connaitre, reconnaitre et prendre en compte les conditions sociales de l’engagement, est fondamental pour qui veut fédérer les mobilisations autour des conditions de travail. Or, l’hétérogénéité des trajectoires sociales et professionnelles, par exemple, font que l’attachement au travail sera plus ou moins fort et que, de ce fait, on hésitera plus ou moins à remettre en cause les conditions sanitaires de son effectuation. Ou encore la peur de découvrir que l’on est soi-même malade peut également être une résistance à l’engagement.
Les regards croisés sur ces questions sont prometteurs. Solidaires entend être partie prenante dans ces réflexions.
Prochaines séances:
Jeudi 3 avril, 14h-17h (attention salle inhabituelle : salle 1, RdC) Le métier d’inspecteur du travail, ses évolutions, ses contradictions avec Marie Szarlej, CENS.
Jeudi 22 mai, 14h-17h Pour quoi faire reconnaître sa maladie professionnelle (et pourquoi elle n’est pas reconnue) avec Cécile Durand, GISCOP 93, et Anne Marchand, sociologue, Université d’Evry et GISCOP 93.
Jeudi 12 juin, 14h-17h Les travailleurs sous-traitants de l’industrie nucléaire avec Marie Ghis, CEMS.
Lieu : Cette année, le séminaire a lieu à l’EHESS, bâtiment « Le France », 190-198 avenue de France, 75013 PARIS. Salle 587 (cinquième étage).