Évaluation des salariés : plusieurs décisions importantes…

Après le jugement du tribunal de grande instance de Lyon qui met en cause le système de benchmark (mise en concurrence des équipes et des individus) à la Caisse d’épargne Rhône-Alpes, plusieurs décisions de tribunaux confirment la possibilité d’actions collectives pour les CHSCT et les organisations syndicales.

Interdiction de critères d’évaluation non conformes au code du travail…
Constatant l’absence de consultation des instances et une mise en place d’un système d’évaluation par quotas avec un nombre de salariés à classer par niveau, les CHSCT de Hewlett Packard ont assignés leur entreprise pour obtenir d’une part la consultation des instances et d’autre part le le retrait du système ainsi d’évaluation.
Extrait du jugement du TGI de Grenoble le 18 février 2013, la société Hewlett Packard « a commis une entrave aux attributions et au fonctionnement des CHSCT et du CE en les consultants tardivement »
« Dit illicite le mode d’évaluation des salariés en ce qu’il est tenu compte dans l’évaluation individuelle des salariés des résultats financiers des divisions (Business Units) auquelles ils appartiennent, en ce que les critères d’évaluation ne sont ni précis, ni objectifs, ni transparents et en raison de la méconnaissance de l’obligation d’information préalable des salariés »
« Interdit de faire application de critères d’évaluation non conformes aux dispositions légales »
Ce jugement prouve de nouveau la possibilité pour le CHSCT d’ester en justice et d’intervenir sur la politique de l’entreprise.

Les décisions de la cour de cassation confirment…
La mise en œuvre d’un mode d’évaluation reposant sur la création de groupes affectés de quotas préétablis que les évaluateurs sont tenus de respecter est illicite, a décidé le 27 mars, la Cour de cassation, qui s’est prononcé pour la première fois sur l’utilisation du système de « ranking par quotas ». Ce système d’évaluation « ranking par quotas » ou « ranking forcé », consiste à classer les salariés en différentes catégories en fonction de leurs « performances », tout en imposant à l’évaluateur de respecter, pour chaque catégorie, un pourcentage prédéterminé de salariés à affecter. Les organisations syndicales et le comité d’entreprise de la société Hewlett Packard France dénonçaient la mise en place de ce système d’évaluation imposant au notateur le classement des salariés dans cinq groupes (du plus au moins performant : K, P +, P, P –, I), selon des pourcentages prédéterminés et non des critères « objectifs » de compétences. Les chefs de service devaient noter sur un niveau de 5 % minimum de I et de 20 % maximum de P. Le groupe K, le plus performant, se voyait quant à lui attribuer un pourcentage maximum de 20 % de salariés.
Dans son arrêt du 27 mars, la Cour de cassation pose pour principe que « la mise en œuvre d’un mode d’évaluation reposant sur la création de groupes affectés de quotas préétablis que les évaluateurs sont tenus de respecter est illicite ». Seules les aptitudes du salarié doivent donc être prises en compte lors de l’évaluation (C. trav., art. L. 1222-2), et celles-ci ne doivent pas être minimisées ou sur-évaluées pour remplir des quotas préétablis.

Des perspectives d’initiatives pour les CHSCT…
Malgré la longueur des procédures (le jugement du 27 mars 2013 de la cour de cassation confirme un jugement de la Cour d’appel de Versailles du 8 septembre 2011, le jugement du TGI de Grenoble du 18 février 2013 fait suite à une assignation du CHSCT le 1er avril 2010), l’action en justice constitue une des possibilités d’action syndicale.
Il faut pour cela accumuler des preuves (PV de CHSCT, documents de la Direction, mails, notes et préconisations internes etc…), demander aux inspecteurs du travail et aux médecins du travail de se prononcer, décider d’expertise en CHSCT mais ces initiatives renforcent les possibilités d’échanges avec les salariés et au bout du compte doivent permettre la mobilisation.