Droit de retrait collectif au Louvre

Samedi : annonce de la fermeture du Salon de l’agriculture au motif de l’interdiction de rassemblement de plus de 5 000 personnes en espace confiné, annulation du semi-marathon de Paris (40 000 personnes en zone non confinée avec « participation internationale »). Et 49,3 !

Dimanche : AG improvisée par SUD à la demande des collègues qui ne comprennent pas l’ouverture du Louvre dans ce contexte (30 000 personnes par jour, espace fermé, 75 % de public étranger) sans qu’aucune nouvelle mesure de prévention ne soit prise.

La totalité des collègues sont présent·es, de tous niveaux hiérarchiques et services, des salarié-es de prestataires privés participent également.

Des représentants de la direction et le médecin arrivent et répondent en direct aux questions ; aucune mesure concrète, juste un rappel des directives gouvernementales.

Droit de retrait décidé par les collègues, impossibilité pour le musée d’ouvrir. La direction ne reconnaît pas le droit de retrait, tout le monde reste sur place, mais personne ne reprend son poste. Pendant que les militant·es SUD sont avec les agent·es et gèrent les pressions, la CGT se fait légitimer de l’extérieur par les médias.

Lundi : re-AG, poursuite des discussions avec les collègues (nous avons déjà passé toute la journée la veille ensemble), nous construisons ensemble les demandes selon les axes suivants :
• mise en place de mesures de prévention immédiates ;
• actualisation en urgence du plan de continuation d’activité (PCA)/risque pandémique et plan d’action afférent ;
• mise à l’abri des personnes à risque (/pathologies) ;
• mise à l’abri des aidant-es qui ne veulent pas mettre en danger leurs proches âgés·es et/ou malades, puis des parents isolés.

CHSCT Louvre à 11h : la direction reprend les éléments de langage dictés par le ministère et visant à justifier les décisions des pouvoirs publics. Aucune proposition ni reprise de nos demandes, si ce n’est au cas par cas ; on est donc exclusivement sur le registre des réponses individuelles absolument pas de mesure collective. Les établissements ont reçu ordre de ne rien faire en dehors des instructions directes venues des tutelles. Sauf qu’instruction il n’y a point ! Juste transmission des points de situation par le « haut fonctionnaire à la défense ».

CHSCT ministériel à 14h30 : demande de SUD en amont de présentation de la liste des PCA actualisés dans les établissements et services du ministère de la Culture. Résultat : aucun n’a été actualisé parce que le ministère n’a donné, à aucun moment, instruction de le faire. Dans le contexte, les OS demandent la reprise du travail fait en 2009 pour le risque pandémie grippale (qui était très imparfait !) afin d’avancer rapidement sur le phasage des stades à venir. Sachant que de toute façon une bonne partie n’est pas adaptable en raison de l’énorme retard à l’allumage des pouvoirs publics… Le ministère de la Culture semble passé sous tutelle de l’intérieur et obéit aveuglément à la cellule interministérielle sans être capable d’y faire entendre ses problématiques. Les cadres du ministère acquiescent lorsque SUD émet l’hypothèse d’un passage au stade 2 trop précoce ayant pour visée de glisser le 49.3, et prenant dans la foulée de cours les administrations.

Alors qu’aucune décision valable n’est prise en séance, la réunion de crise « risque de pandémie du droit de retrait » qui suit au cabinet et les échanges du point de vue politique ont pour conséquence un compte-rendu d’instance reprenant une bonne partie de nos demandes.

Mardi : Une série de bilatérales est organisée avec le président du Louvre. Les verrous politiques ont sauté dans la nuit, le musée ayant maintenant pour mandat un plan de prévention de la mise en exergue des inconséquences gouvernementales et de l’absence totale d’anticipation.

Les propositions de l’administration reprennent la totalité des demandes portées par SUD la veille. Nous y ajoutons la demande de la constitution d’une cellule de crise qui, si elle existe de manière informelle, ait une existence institutionnelle.

2e CHSCT Louvre : Le Louvre annonce que ni lui ni le ministère n’est en capacité de comprendre et donc d’expliquer les mesures énoncées par le préfet. Donc on suit les consignes d’ouverture ou de fermeture, mais en mettant en place un plan d’action.

Officialisation des mesures discutées

Réduction des risques, mise en œuvre immédiate :
• Limitation l’exposition des personnels (mise à distance du public, diminution du temps de présence public via organisation du travail modifiée et abandon de certaines missions, possibilité pour les agents de quitter leur poste plus facilement notamment pour se laver les mains). Visites des postes de travail dans les cas où il est nécessaire de réfléchir in situ. Suppression des paiements en espèces, uniquement CB.
• Mesures d’hygiène : Distribution de gel hydroalcoolique à chaque agent, nettoyage des outils partagés, des poignées de porte, rampes, boutons d’ascenseur… Affichages indiquant la manière de se laver les mains efficacement, anticipation des besoins accrus en savons + sèche-main, hausse de la fréquence de réapprovisionnement. Nettoyages sanitaires + fréquents.
• Information du public concernant le mode dégradé. Signalétique ++ pour les consignes.

Protection des plus fragiles et ASA :
• Les personnes habitant dans les clusters et/ou ayant des enfants qui ne vont pas à l’école restent chez eux sur autorisation d’absence exceptionnelle.
• Les personnes présentant des pathologies à risque (immunodéprimés, insuffisants cardiaques, respiratoires, les diabétiques avec insuline…) se signalent à la médecine de prévention. En fonction des situations (et des postes de travail), des préconisations seront faites (télétravail, port de masque sur le trajet domicile/travail, changement de mission…). Les agent·es travaillants face au public seront extrait-es de toute manière. Si les préconisations ne peuvent être mises en œuvre (ce qui sera le cas pour la majorité), les agent·es seront en autorisation d’absence.
• Aidant·es/parents isolés : avec l’avancé de l’épidémie, seront prioritairement écarté·es du musée (via ASA).

Cellule de crise : une cellule spécifique est créée pour anticiper l’évolution de la crise. Mise à jour d’un plan de pandémie (basé sur celui de 2009 « grippe aviaire ») qui sera finalisé dans un mois max. Cette cellule anticipera les mesures à prendre, déclenchera la mise à l’abri des aidants et parents isolés…

Mercredi : le président du Louvre réunit les personnels pour annoncer les mesures. La CGT et la FSU, en campagne pour les élections du conseil d’administration profitent de la tribune pour paraître offensive, ce qui rend complexe l’AG intersyndicale prévue dans la foulée. Finalement les collègues, conscient-es d’avoir gagné beaucoup (et vraisemblablement plus que ce que les autres musées mettront en place) décident majoritairement de reprendre le travail.

Le droit de retrait de dimanche et lundi, s’il n’est pas reconnu par l’administration, ne donnera pas lieu à retrait sur salaire.

Pour le Louvre maintenant il s’agit de suivre la totalité de la mise en œuvre du plan d’action et nous avons énormément de sollicitations d’agent·es sur les procédures mises en place. Pour l’ensemble du ministère de la Culture, il y a du boulot !! On notera quand même que les Sarkozystes avaient réussi à flinguer les retraites, la fonction publique via la RGPP et néanmoins anticiper une pandémie grippale jamais advenue. Comme quoi les libéraux perdent en compétences…