Suicides à France Télécom : le procès

Les chroniques au jour le jour

« Si Didier Lombard est condamné, personne ne voudra plus diriger une grande entreprise. » Chiche ?

L’audience du 1er juillet 2022 du procès en appel des dirigeants de France Télécom, vue par Dominique Manotti, qui a toujours vécu à Paris, est une écrivaine française de roman noir, historienne, spécialiste de l’histoire économique du XIXe siècle, militante et syndicaliste, dernier roman paru Marseille 73, (le roman de l’été 73, multiples assassinats d’Algériens en ville, la réponse par les grèves du Mouvement des Travailleurs Arabes) aux éditions Les Arènes.


Vendredi 1er juillet s’est tenue, au Palais de Justice de Paris, la dernière séance du procès en appel de France Télécoms, nous avons entendu les plaidoiries des trois avocats de Didier Lombard, l’ancien PDG de France Télécoms, puis la parole a été donnée pour quelques derniers mots aux deux accusés, Didier Lombard et Louis-Pierre Wenès. Le jugement sera prononcé le 30 septembre prochain.

Quelques notes et impressions totalement subjectives. Continuer la lecture de « « Si Didier Lombard est condamné, personne ne voudra plus diriger une grande entreprise. » Chiche ? »

Rendez-vous le 30 septembre pour le verdict

Audience du 1er juillet vue par Maëlzig Bigi, sociologue, membre du Laboratoire interdisciplinaire pour la sociologie économique (LISE), a travaillé notamment sur les questions de la reconnaissance au sein des organisations du travail.


Ce vendredi 1er juillet se déroule la dernière matinée d’audience du procès en appel France Télécom. Le public fait la queue pour entrer dans le tribunal, en face des touristes qui attendent pour visiter la Sainte Chapelle. Pendant ce temps, des barrières de sécurité sont enlevées du boulevard du Palais, derniers signes du tumulte du procès historique des attentats du 13 novembre, dont le verdict a été rendu l’avant-veille.

La salle d’audience, richement ornée, chargée d’histoire, tranche avec la sobriété clinique du nouveau TGI de la porte de Clichy où s’est tenu le premier procès il y a trois ans. Continuer la lecture de « Rendez-vous le 30 septembre pour le verdict »

Un peu de féminisme dans ces chroniques

En attendant les chroniques à venir, nous publions ce plaidoyer féministe de Claire Robert. Il est d’autant bien venu qu’il est tout à la fois l’expression d’un vécu en tant que femme et une précision qui manquait sur le sens qu’il convient de donner au mot « systémique ».


Bon alors moi, je trouve que ça manque un peu de féminisme dans ces chroniques.
C’est vrai qu’on ne voit pas forcément le rapport.
Moi non plus, au début.
Vu que c’est un procès sur la souffrance au travail.
Surtout que moi, je suis venue là un peu par hasard, puisque que je ne suis pas fonctionnaire, ni syndicaliste, ni salariée de France Télécom, ni salariée tout court d’ailleurs.
C’est Pascal Vitte et Patrick Ackerman qui m’ont demandé de venir faire des dessins. Bon, moi, ça m’a intéressée de dessiner dans un tribunal, je ne l’avais jamais fait, et puis j’avais besoin de sous donc ça tombait bien. Être payée pour dessiner toute la journée (même quand ton dessin est raté), quel pied !
Donc j’y suis allée avec mes carnets. Continuer la lecture de « Un peu de féminisme dans ces chroniques »

Tout l’océan dans une goutte d’eau.

L’audience du 30 juin vue par Stéphane Brizé, réalisateur et scénariste de films, notamment « La loi du marché », « Mademoiselle Chambon », « Une vie », « En guerre » et enfin « un autre monde ».


Jeudi 30 juin 2022, avant dernier jour du procès en appel des six cadres de France telecom. Il y a quelques jours, le parquet a requis, en se fondant sur les peines prononcées en première instance : 6 mois de prison ferme pour l’ancien PDG Didier Lombard ainsi que pour son N°2, Pierre-Louis Wenès (contre 4 retenus par le jugement précédent). 6 mois avec sursis simple pour leurs complices. Des réquisitions identiques pour ces derniers au jugement de première instance. Continuer la lecture de « Tout l’océan dans une goutte d’eau. »

L’idéologie du dialogue social en procès

Par Martin Thibault, enseignant-chercheur en sociologie à l’Université de Limoges. Auteur aux éditions Raisons d’agir des livres Ouvriers malgré tout (2013) et En luttes ! Les possibles d’un syndicalisme de contestation, (avec Sophie Béroud) en 2021.


« Mon avocat ne m’a jamais donné un mauvais conseil, il me les a toujours vendus. » (Jean Yanne)

Nous sommes le mercredi 29 juin 2022. Le tribunal de Paris est en ébullition. Ce soir, le procès des attentats du 13 novembre doit rendre son verdict et occupe – à juste titre – une forte attention. Dans la salle où nous sommes, le procès en appel de France Télécom touche lui aussi à sa fin et la séance du jour voit les avocats de la Défense se succéder à la barre. L’essentiel des plaidoiries porte ce jour sur la défense de plusieurs acteurs clés du procès : mesdames Nathalie Boulanger (ex-directrice des relations territoriales, aujourd’hui directrice d’Orange Start-Up Ecosystem) et Brigitte Dumont (ex-responsable du programme ACT devenue depuis directrice du développement personnel, puis des RH avant de partir à la retraite), condamnées en première instance à 4 mois de prison avec sursis et 5 000 euros d’amende, pour complicité de harcèlement moral. Continuer la lecture de « L’idéologie du dialogue social en procès »

Et en attendant on continue à (se) tuer

Sylvain Leder, Professeur agrégé de Sciences économiques et sociales. Coordonnateur au Monde Diplomatique du Manuel d’économie Critique et auteur de plusieurs articles en particulier sur la relation entre les enseignants et le patronat.


Les deux avocats de la défense se succèdent à la barre et plaident tout simplement la relaxe pour Jacques Moulin, Directeur Territorial chez France Telecom pour la région Est.

Dessin de Claire Robert

En ce mercredi 28 juin la séance sera courte. Courte parce qu’inutile de le dire, de le répéter, de le démontrer : Jacques Moulin est innocent, ou pas plus coupable que les autres. Il ne savait pas, les syndicats n’étaient pas à la hauteur, il n’est pas coupable et pas même responsable. D’ailleurs les avocats insistent : Jacques Moulin n’était aucunement intéressé par une promotion au niveau national, les primes pour atteindre les objectifs de licenciement étaient négligeables.

Bref, pas de mobile, pas de crime.   Continuer la lecture de « Et en attendant on continue à (se) tuer »

Criminels de guerre… sociale

Audience du 24 juin vue par Denis Perais, syndicaliste à SUD Intérieur


Ce 24 juin 2022, c’est l’heure des réquisitions du ministère public incarné pour l’occasion par Yves Micolet et Valérie De Saint-Félix. Plus de sept heures au total, simplement interrompues d’une pause de… vingt minutes.

Il fallait par conséquent être en bonne forme physique et mentale pour affronter cette course d’endurance correspondant à l’équivalent de trois marathons dans la même journée (pour les meilleurs de la spécialité).

Et visiblement Yves Micolet l’était. Lui qui répondra dans un rare moment de légèreté à la présidente qui commençait [un peu] à s’impatienter de la longueur de son réquisitoire : « Je fais 60 kilomètres à vélo toutes les semaines pour me préparer ». Pour le « Tour de France » ? Continuer la lecture de « Criminels de guerre… sociale »

« A-t-on déjà trainé Dieu devant les tribunaux ? »

Audience du 23 juin, vue par Thibault Sartori, metteur en scène et acteur.


L’audience n’a pas encore commencé. J’attends assis au milieu des bancs. Autour de moi, on s’agite un peu, on se prépare. Il y a des avocats qui boutonnent leur robe, d’autres qui vérifient leurs mails et des personnes des parties civiles qui discutent entre elles. Il y a une ambiance qui ressemble à un de ces désordres auquel des étudiants participent volontiers avant que le professeur ou une quelconque figure d’autorité ne fasse son apparition.  Continuer la lecture de « « A-t-on déjà trainé Dieu devant les tribunaux ? » »

Du mépris managérial

Journée du 22 juin, plaidoiries des parties civiles vue par Romain Pudal, sociologue.


La journée du 22 juin était consacrée aux plaidoiries des parties civiles. Se sont donc succédées les avocates exposant chacune (je n’ai assisté qu’à des plaidoiries d’avocates en l’occurrence) avec un angle d’attaque spécifique et en fonction des parties civiles représentées son analyse du dossier France Télécom et demandant in fine et sans le moindre doute possible, la confirmation en appel de la première condamnation. Au-delà de l’émotion qui parcourt régulièrement la salle à l’écoute des souffrances endurées, face aux familles, collègues ou ami-e-s endeuillé-e-s et plus encore que l’argumentation juridique, rigoureuse, documentée, implacable, ce qui m’a frappé, c’est la récurrence des mêmes questions… des questions qui hantent la salle, les couloirs, les conversations et probablement les consciences et les mémoires. (Jusqu’où) savaient-ils ce qu’ils faisaient ? L’ont-ils fait sciemment ou non ? Comment ont-ils pu ignorer les multiples alertes ? Comment ont-ils pu ne pas entendre et ne pas voir ? En sociologue, on s’intéresse souvent aux conditions de possibilité de tel ou tel phénomène et c’est donc ainsi que je vais tenter de proposer des pistes d’interprétation. Continuer la lecture de « Du mépris managérial »

Bonhomie monstre.

Audience vue par Barthélémy Bette, sociologue et auteur de fiction, écrit actuellement une thèse sur des pratiques artistiques se mettant en relation avec les mondes du travail.


Aujourd’hui ce sont les avocats des parties civiles qui vont s’exprimer. Elles vont à nouveau décrire dans les grandes lignes les agissements des dirigeants de France Télécom. Une sorte de synthèse du premier procès. Maître Sylvie Topaloff, la première à intervenir, exprimera la lassitude qu’il y a à répéter les mêmes choses depuis treize ans face à tant de déni – de dénégation bien consciente précisera ensuite Maître Frédéric Benoist. Comme s’il fallait répéter à l’infini ce ce qu’ils n’accepteront jamais d’entendre. Une surdité à rendre fou, au point que les victimes, les familles des suicidés, n’attendent plus rien des prévenus, alors que c’est généralement le cas même dans les affaires les plus sordides, qui concernent des personnalités dont on peut légitimement désespérer. Tout au plus l’un des mis en cause – Nathalie Boulanger pour ne pas la citer – a su reconnaître une « responsabilité morale », rien de plus. Surtout pas de responsabilité juridique, uniquement l’expression d’une bonne conscience sur le mode de l’apologétique chrétienne. Malgré tout ce jour-là plusieurs plaidoiries vont lui savoir gré de cette timide repentance, comme s’il fallait se raccrocher à quelques traces d’humanité pour ne pas vaciller. Insistance qui révèle en creux l’indécence de la défense des autres prévenus… Continuer la lecture de « Bonhomie monstre. »

« Vous savez qu’il y a un poste de maître nageur à la piscine ? »

Audience du 21 juin vue par Yann Le Merrer, Secrétaire fédéral Sud PTT, postier.


Le 21 juin débutaient les plaidoiries des parties civiles. On n’a pas entendu les prévenus ce jour-là, on n’a pas eu l’occasion d’entendre les monstres, mais qu’importe. Fait remarquable, ce sont souvent eux les stars, qu’ils reçoivent une cocarde d’un ministre quelconque ou qu’ils soient les prévenus dans un procès hors norme. Ils focalisent toujours l’attention. Ils ne sont pourtant pas le sujet essentiel, ils sont seulement les algorithmes de la souffrance organisée dans le monde du travail. Ce n’est pas le « procès Lombard », c’est l’espace où les victimes ont pu enfin prendre la parole, c’est l’Agora de celles et ceux que le système vouait à l’oubli. Me De Castro, troisième intervenant, remarquait à raison que les victimes étaient injustement nommées « les 118 » et que cette réification en une entité unique ne leur rendait pas hommage. Ils et elles ne sont pas un nombre. Ils sont des histoires, des drames, des humain·es que la machine a poussé au suicide ou brisé pour longtemps. Continuer la lecture de « « Vous savez qu’il y a un poste de maître nageur à la piscine ? » »

La raison des plus forts et de leur dame

Audience du 17 juin vue par Fabienne Hanique, sociologue, auteure notamment de Le sens du travail. Chronique de la modernisation au guichet, érès.


Afin de parer autant que faire se peut les pénibilités des chaleurs caniculaires qui étoufferont la journée, l’audience a été avancée d’une demi-heure…

Il est 8 h 20 lorsque j’entre dans la salle d’audience.

A mon tour de découvrir la magnificence des lieux vantée par les chroniqueurs précédents : boiseries sculptées et dorures de la république, blasons portant haut la vocation de la salle (lex / jus)… mais également, il faut en convenir, une configuration spatiale  peu pratique pour qui, dans le public, souhaiterait tout voir, tout entendre….. La salle est vaste et haute, mais également étroite et longue. En dépit de l’installation de micros, tout porte à penser qu’il faudra tendre l’oreille et se montrer attentif pour saisir le moindre détail de ce qui se jouera là-bas, à la barre, entre le déposant et la présidente. Continuer la lecture de « La raison des plus forts et de leur dame »

Si c’était à refaire…

Chronique du 17 juin vue par Juliette BOURGEOIS, avocate en droit du travail, membre du Cabinet BOURGEOIS MARIUS Associées, intervenante à la permanence conditions de travail et santé.


Cette audience du vendredi 17 juin clôt la série d’interrogatoires récapitulatifs des prévenus avec Louis-Pierre Wenes et Didier Lombard.

L’un et l’autre auront l’occasion, pour la dernière fois avant que ne débutent les plaidoiries des parties civiles, de présenter des observations et répondre aux questions de la Cour et des avocats. Continuer la lecture de « Si c’était à refaire… »

La complicité et ses instruments

La chronique du 16 juin vue par Dominique Lhuilier, professeure émérite au centre de recherche sur le travail et le développement (CNAM), Paris et directrice de la collection Clinique du travail (avec Y. Clot), a publié notamment Placardisés (Seuil, 2002), La créativité au travail (ÉRÈS, 2017).


Le prévenu se lève et se rend à la barre. La présidente enchaîne et présente le programme de cette matinée, un interrogatoire récapitulatif et examen de personnalité, précisant qu’un CV servira d’appui à cet examen.

D’emblée, elle donne le ton : le parcours de ce prévenu diffère de ceux des autres. Guy-Patrick Cherouvrier est entré dans l’entreprise en 1997 sur un poste de gestion, ordonnancement des chantiers, après avoir obtenu un diplôme d’ingénieur. Et tout son parcours, de contractuel puis de fonctionnaire 3 ans après, jusqu’à sa fonction de DRH France à France Télécom, témoigne d’une mobilité sociale ascendante. L’ascenseur social semble avoir été actionné de nombreuses fois par ses supérieurs. G.P Cherouvrier affirme ou laisse entendre de façon répétée qu’il ne demande pas, ne postule pas, il est sollicité : « X me l’a demandé ». Les X sont toujours des personnages essentiels qui ont œuvré à la transformation de France Télécom. Michel Bon a dirigé le changement de statut de l’entreprise pour en faire une société anonyme de droit privé et a piloté son introduction en bourse ; il « demande » à G.P. Cherouvrier de créer une association visant à installer et développer l’actionnariat salarié. Il en sera le président durant quatre ans. Directeur régional à Metz, directeur régional Ile de de France Est, il aura à réaliser une fusion entre deux entités « pour accroître la performance », coach des directeurs régionaux, il sillonne la France… Son N+1, Olivier Barberot, lui « demande » de prendre le poste de DRH France ; il sera alors reçu par Didier Lombard … qu’il ne quittera plus, « il a toujours été mon N+2 ». Continuer la lecture de « La complicité et ses instruments »

Pas besoin de crier

Chronique du 16 juin vue par Fanny Darbus, sociologue, responsable du Master de recherche parcours Santé et Conditions de travail, a copublié notamment Des morales de classe ? Dispositions éthiques et positions sociales dans la France contemporaine, Actes de la recherche en sciences sociales, nov 2018, n° 224.


Les témoins de Mme Boulanger. Suite de la journée. À partir de 11h30 et jusqu’à 16h défileront 3 témoins venus pour redorer le blason managérial de Nathalie Boulanger, directrice des actions territoriales à l’époque des faits. Finalement, ils parviendront seulement à lever une potentielle équivoque au sujet de son comportement.  Continuer la lecture de « Pas besoin de crier »

Voyage judiciaire en grande bourgeoisie économique

Chronique du 15 juin vue par Laurent Willemez, sociologue du droit du travail, auteur notamment d’une note de lecture de La Raison des plus forts parue dans La Nouvelle Revue du Travail en ligne.


En cette matinée du 15 juin, la présidente procède à l’examen de personnalité de quatre des prévenu·es. Dans le public, les parties civiles sont à gauche, et au premier rang des bancs de droite se tiennent les épouses des deux principaux prévenus. Pas moins de quatre interrogatoires auront lieu pendant la matinée, dans l’ordre de la hiérarchie de l’entreprise, et donc des responsabilités. Pour le sociologue, ces interrogatoires constituent un matériau très rare permettant de comprendre les positions sociales des prévenu·es, et de faire le lien entre leurs positions, leurs manières de se percevoir dans le procès et leur responsabilité. Et, sorte de miracle sociologique, quand la présidente du tribunal déroule, comme elle le dit en citant les textes de procédure, « la situation personnelle, familiale, sociale et patrimoniale » des prévenu·es, on se retrouve face à ce que P. Bourdieu appelait l’ajustement parfait entre des positions et des dispositions, et ce d’autant plus qu’il s’agit aussi de comprendre leur « philosophie » et leurs « valeurs. ». Il sera en réalité assez peu question, cette matinée-là, des faits qui leur sont reprochés. Continuer la lecture de « Voyage judiciaire en grande bourgeoisie économique »

« On s’est trompé »

Chronique du 15 juin vue par Vincent Gaullier, réalisateur de films documentaires.


Tout comme les films de zombis ou les westerns, les films de procès sont un genre à part entière ; avec ses codes et ses invariants. Des films qui profitent à plein ce que concentre une audience, avec le prétoire pour plateau et les prévenus, avocats, magistrats… ou le public pour personnages.

Pour autant, malgré toutes les qualités artistiques et techniques des réalisatrices et réalisateurs, leurs œuvres n’égalent jamais la puissance du réel. Sans doute parce que ce réel suffit à la dramaturgie du récit, sans besoin d’aller chercher une complexité inventive et subtile, sans besoin de pallier la banalité du quotidien. Il est là, s’imposant à nous spectateurs.

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Rester debout

Chronique du 10 juin vue par Arno Bertina, écrivain, dernier titre paru : Ceux qui trop supportent (Verticales 2021).


Lorsque Nicolas Guérin se lève pour répondre, le vendredi 10 juin 2022, à l’invitation de la Présidente, je n’ai aucune idée de ce qu’il va dire. J’ai aperçu cet homme à 9h devant le palais de justice, bavardant amicalement avec Didier Lombard et son épouse, mais je ne sais pas encore qu’il est le secrétaire général d’Orange, ni qu’il représente l’entreprise au cours des audiences du procès en appel.  Continuer la lecture de « Rester debout »

Le « boucher » à l’écoute du travail réel ?

Chronique du 9 juin, vue par Thomas Coutrot, économiste, statisticien à la Darès. A publié en 2018 Libérer le travail – pourquoi la gauche s’en moque et pourquoi ça doit changer, Seuil.


Séance de cinéma surréaliste à l’audience du 9 juin. La défense de Pierre-Louis Wenes fait projeter de longs extraits de films de communication interne de France Télécom remontant aux années 2000.  L’objectif : démontrer à la Cour la grande sollicitude du directeur exécutif des opérations France, n° 2 du groupe derrière Didier Lombard, pour le travail réel de ses salariés.

Dessin de Ornella Guidara

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Militer autrement pour résister face à la souffrance de nos collègues et aux politiques criminelles de nos directions !

Chronique du 9 juin vue par Gérald Le-Corre, inspecteur du travail, militant CGT, secrétaire du CHSCT du Ministère du travail.


A l’ouverture de l’audience du 9 juin 2022 au matin, la présidente donne la parole à Jean-Paul Portello, ex-délégué syndical SUD de France Télécom à Annecy.

Le témoignage de Jean-Paul porte notamment sur le suicide de Jean-Paul Rouanet qui a mis fin à ses jours en se jetant d’un viaduc le 28 septembre 2009. Il est une des 39 victimes citées dans l’ordonnance de renvoi en correctionnel des juges d’instruction pour illustrer l’existence du harcèlement moral institutionnel de France Télécom.  Continuer la lecture de « Militer autrement pour résister face à la souffrance de nos collègues et aux politiques criminelles de nos directions ! »

Qui est Charles-Henri Filippi ?

Retour sur la journée du 9 juin par Pascal Vitte, avec le témoignage de Charles-Henri Filippi.
(dessins de Claire Robert et Ornella Guidara)

Le 9 juin 2022 s’ouvre la douzième journée du procès de France télécom en appel. Ce jour-là, Didier Lombard fait citer son témoin en la personne de Charles-Henri Filippi. Membre du conseil d’administration de France Telecom entre février 2008 et mai 2020, et aujourd’hui de Nexity, il se définit volontiers comme un « banquier humaniste ».

Continuer la lecture de « Qui est Charles-Henri Filippi ? »

Le chevalier blanc et le bon copain

La chronique de la 1ère audience du 8 juin par Isabelle Bourboulon, journaliste indépendante, auteure du Livre noir du management (Éditions Bayard, 2011), membre du Conseil scientifique d’Attac. Ce jour-là, deux témoins vont déposer devant la Cour : Jacques S., partie civile à titre personnel, et Noël Rich qui fait partie des 39 victimes reconnues lors des mises en examen.


« J’ai un dossier très lourd »

Jacques S. s’est désisté de son appel mais s’il est présent aujourd’hui c’est qu’il veut déposer et être entendu. Il s’est porté partie civile à titre individuel et ne fera mention de ses collègues qu’incidemment. En arrêt de travail pour dépression à partir de 2009, Jacques est aujourd’hui retraité invalide. Mais comment a-t-il pu tenir si longtemps alors qu’il se battait seul contre tous, tel un chevalier blanc sûr de son bon droit contre un monstre et ses affidés ? Comment ne pas être brisé, laminé dans cette bataille inégale ? Continuer la lecture de « Le chevalier blanc et le bon copain »

Sans boussole

Chronique de la première audience du 8 juin, vue par Cécile Rousseau, journaliste.


Tenter de comprendre. A tout prix. Jacques S. n’en finit pas de fouiller dans ses souvenirs et sa montagne de documents pour trouver une raison au calvaire subi chez France Télécom. « Nous avons de nombreux écrits à notre disposition. Vous êtes une partie civile très active », lui lance d’emblée la présidente du tribunal, Pascaline Chamboncel-Saligue. Le sexagénaire a radiographié, chaque date, chaque étape, presque chaque instant, de sa descente aux enfers. Mais trop atteint, il s’est désisté de son appel. Vivre un hypothétique procès en Cassation lui est insupportable. « J’ai subi un acharnement spécifique car j’ai voulu témoigner de ce qui s’était passé. A chaque fois, que je me plaignais de harcèlement, j’ai reçu une sanction. En 2009, je suis resté un an mis à pied sans salaire », soupire-t-il. Dans cet univers kafkaïen où les victimes sont traitées comme des coupables, Jacques S. a plongé dans les méandres de la dépression. De salarié modèle en 2003, il devient progressivement mouton noir. En mars 2007, l’accès à son lieu de travail est bloqué. En 2008, alors qu’il boucle une licence de psychologie, France Télécom refuse de lui accorder quelques jours pour passer ses examens. La même année, il fait une déclaration de harcèlement moral. En 2009, il subit une cinquième tentative d’interrogatoire. Continuer la lecture de « Sans boussole »

« Le win ratio est mon job »

Chronique du 3 juin vue par Vincent Glenn, producteur, réalisateur et auteur.


3 juin 2022. Palais de justice à Paris. A l’invitation des camarades de Sud Telecom, j’assiste au procès en appel de 6 anciens dirigeants de France Télécom, ex fleuron national rebaptisé Orange en 2013 à l’issue d’un processus de privatisation commencé en 1988.

(Après avoir patienté dans la file d’attente et suite à la longueur des contrôles, – non loin se déroule la 132 ème journée du procès des attentats du 13 novembre et le Palais de justice est surprotégé, j’arrive dans l’immense salle du tribunal.)

Dessin de Ornella Guidara
Continuer la lecture de « « Le win ratio est mon job » »

Lettre ouverte à Didier Lombard

Au soir de l’audience du procès France Télécom du 3 juin 2022

L’audience du 3 juin, vue par Annie Thébaud-Mony, sociologue, Directrice de recherche Inserm, présidente de l’association Henri Pézerat, auteure, entre autres, de Travailler peut nuire gravement à la santé, La découverte, et de La science asservie, La découverte.


Aujourd’hui, 3 juin 2022, c’est mon tour d’écrire une chronique sur l’audience de ce matin au procès pénal dont vous, Didier Lombard, êtes le principal prévenu, avec quelques-uns de vos ex-collaborateurs. Et c’est à vous que je souhaite m’adresser.

Dessin de Ornella Guidara

Parce que vous avez fait appel de la décision vous condamnant en première instance, celles et ceux que la justice désigne comme « les parties civiles » sont contraints de revenir témoigner de ces faits gravissimes : le suicide d’un père, d’un frère ; revenir encore et encore sur l’enchaînement des faits qui ont conduit à ces drames dont la genèse se situe dans le travail. Exprimer encore et encore le (non)sens et la disqualification vécues qui ont frappé ces techniciens expérimentés. Redire la violence d’un « harcèlement institutionnel » aux très nombreuses victimes. Devoir expliquer ce que cela signifie dans la vie des familles. Quand on aime, quand on a aimé, le deuil n’existe pas. L’absence est souffrance et le drame est sans fin ! Continuer la lecture de « Lettre ouverte à Didier Lombard »

« Rien n’est Vrai, tout est vivant¹ » et « Pas ma faute »

La chronique du 2 juin vue par Roland Gori, psychanalyste, professeur honoraire des universités, auteur de La Fabrique de nos servitudes (2022, Les Liens qui Libèrent) ; préside actuellement L’Appel des appels, association initiée en 2009 avec Stefan Chedri pour protester contre la casse des services publics et la prolétarisation des professionnels, et Alain Abelhauser, psychanalyste, professeur des universités (psychopathologie clinique), auteur de Mal de femme (Seuil, 2013) et Un doute infini (Seuil, 2020) ainsi que, avec Roland Gori et Marie-Jean Sauret, de La folie Évaluation. Les nouvelles fabriques de la servitude (Mille et une nuits, 2011). Il a succédé à Roland Gori à la présidence du SIUEERPP (Séminaire Inter-Universitaire Européen d’Enseignement et de Recherche en Psychopathologie et Psychanalyse). Continuer la lecture de « « Rien n’est Vrai, tout est vivant¹ » et « Pas ma faute » »

Quand France Télécom fait école

L’audience du 1er juin vue par Guillaume Hallier et Gabrielle, militante et militant à Sud Éducation, membres de la commission conditions de travail.


Aujourd’hui, le point crucial abordé sera la « déflation » et ses outils : formation des cadres et managers et outils de contrôle. Autrement dit : comment faire partir 22 000 personnes de France Télécom en trois ans, entre 2006 et 2008. Ce qui nous frappe au cours de cette journée, c’est la désinvolture des prévenus en complet décalage avec l’objet des échanges : on parle bien de morts, de suicides, d’une catastrophe sociale et humaine. En effet, presque dix heures seront passées ce jour sur les choix et décisions liées à la déflation et qui ont mené au désastre que l’on connaît. Continuer la lecture de « Quand France Télécom fait école »

Petit manuel de défausse managériale

Audience du 1er juin vue par Lucie Goussard et Guillaume Tiffon, sociologues, ont notamment publié ensemble Syndicalisme et santé au travail, 2017, Éditions Le Croquant.


Au programme de ce mercredi 1er juin, deux thèmes pour le moins centraux de ce procès France Télécom : « la déflation », qui renvoie au plan de suppression des 22 000 emplois en trois ans, et « les outils de contrôle » déployés par la direction pour suivre sa mise en œuvre. Au sortir de cette journée, particulièrement dense et éprouvante, un constat, qui passerait presque inaperçu derrière l’aplomb des prévenus : malgré les drames humains dont il est ici question, malgré les faits accablants, malgré les circonstances tout à fait exceptionnelles de ce procès, Didier Lombard, Louis-Pierre Wenès, Guy-Patrick Cherouvrier, Brigitte Dumont, Nathalie Boulanger et Jacques Moulin n’expriment ni regrets, ni remords. A la barre, pas de pleurs, pas d’aveux, pas le moindre signe de culpabilité. Pour assurer leur défense, ils exposent bien plutôt au grand jour leur art de la rhétorique, celui grâce auquel d’ordinaire, lorsqu’ils sont sur leur « terrain de jeu », au sein des instances représentatives du personnel (IRP), tout glisse et semble n’avoir aucune prise sur eux. Alertes syndicales, expertises CHSCT, travaux universitaires, observatoire, inspection du travail, rapports de la médecine du travail, pression médiatique, procès…, rien n’y fait. Fidèles à leur posture, les prévenus démontrent, avec une constance désarmante, leur capacité à se défausser, comme s’ils se sentaient inatteignables, insaisissables même. Cette chronique se propose de revenir sur les différentes techniques utilisées au cours de cette journée pour nier leur responsabilité, à la manière d’un « manuel de défausse managériale ».

Dessin de Claire Robert

Continuer la lecture de « Petit manuel de défausse managériale »

GPC ou la ventriloquie du manadjère

La chronique du 25 mai vue par Vanessa Morisset, historienne d’art, une discipline qu’elle pratique en lien avec les sciences sociales, la philosophie, la littérature, dans le but d’analyser et déconstruire les représentations du pouvoir.
Par ailleurs, elle écrit toutes sortes de choses, dans la presse, sur internet, et au sein du Collectif Troptôttroptard.
En 2021-22, elle participe au « Groupe de travail de groupe », un groupe de réflexions et recherches autour du mot « travail » à l’initiative des Laboratoires d’Aubervilliers.


GPC par Claire Robert

Ce mercredi matin 25 mai, la question examinée par la cour d’appel est celle de la « verticalisation des fonctions », expression qui désigne la réorganisation des méthodes de travail, décidée en 2006 par la direction de France télécom de façon unilatérale [l’adjectif est employé pas moins de 13 fois dans l’ordonnance de renvoi !], en remplacement d’un précédent dispositif issu d’accords en 2003.
L’audience vise ainsi à établir comment cette réorganisation s’est traduite en harcèlement moral et en isolement des personnes en détresse au sein de l’entreprise sans tenir compte de signaux d’alerte. Continuer la lecture de « GPC ou la ventriloquie du manadjère »

Ce qui est arrivé peut recommencer

Audience du 20 mai, vue par Michel Miné, professeur du Conservatoire national des Arts et Métiers (Chaire Droit du travail et droits de la personne), Lise/Cnam/Cnrs, ancien inspecteur du travail. Derniers ouvrages parus, aux éditions Eyrolles Droit du travail en pratique, aux éditions Dalloz-Sirey Droit du travail et aux éditions Larcier Droit des discriminations dans l’emploi et le travail.


Dessin de Ornella Guidara

Vendredi 20 mai 2022. Le temps à l’extérieur est orageux, avec des averses rafraîchissantes, après la journée étouffante de la veille. Par les fenêtres ouvertes de la plus magnifique salle de la Cour d’appel du Palais, riche de boiseries et de peintures, la pluie fait parfois entendre sa musique. L’audience se déroule à partir de 9 h jusqu’au milieu de l’après-midi, avec une suspension de séance. Aujourd’hui, des parties civiles sont auditionnées. Continuer la lecture de « Ce qui est arrivé peut recommencer »

Quand la souffrance s’affiche

La chronique du 20 mai vue par Danièle Linhart, Sociologue, Directrice de recherches au CNRS, travaillant sur l’évolution du travail et de l’emploi, auteure, entre autres, de La comédie humaine du travail. De la déshumanisation taylorienne à la sur-humanisation managériale, Érès, 2015.


Dessin de Claire Robert

La salle est impressionnante avec ses ornements dorés et ses peintures religieuses. Elle n’est pas bondée, nous attendons l’entrée de la Cour. Ce lieu vénérable de l’Île de la Cité ne reproduit pas l’impression que l’on pouvait avoir lors du premier procès au Palais de justice de la Porte de Clichy, un immense bâtiment tout en vitres, à la modernité vertigineuse, aux salles neutres. Ici, on a le sentiment d’un confinement solennel, marqué par une Histoire glaçante, regorgeant de terribles décisions et d’augustes secrets. Continuer la lecture de « Quand la souffrance s’affiche »

La mise en cellule… d’écoutes

L’audience du 19 mai vue par Guy Friedmann, salarié de FT en agence commerciale au temps des premières réformes des années 90 qu’il a raconté dans Le mirage de la compétence (Syllepse, 2000). Devenu sociologue du travail, il a participé à l’Observatoire du stress et des mobilités forcées. Il est membre d’ASD-Pro, association en soutien aux victimes de violence au travail.


Tandis que le procès en première instance se tenait en mai 2019 au nouveau Tribunal Judiciaire installé à Porte de Clichy, avec ses accès mécaniques, ses dimensions aéroportuaires, ses salles immenses, sa modernité livide et impersonnelle, pas loin d’un univers à la Tati, retournement de situation, la suite de ce procès en appel en mai 2022 se déroule dans le prestigieux Palais parisien, mélange de l’ancienne demeure royale et de celui que l’on appelait le « Palais des Appels ». Désormais, c’est avec les boiseries et les envoûtantes tapisseries que le défilé solennel des robes noires dans les couloirs du Palais vous rappelle le sacre de l’éloquence, la force de ceux qui jugent ; les regards magistraux et les allures distinctives vous attirent dans l’esprit des lieux, et ne tremblez pas à la barre ! Continuer la lecture de « La mise en cellule… d’écoutes »

Un homme en colère

La chronique du 19 mai vue par Pascal Marichalar, sociologue et historien au CNRS. Il est notamment l’auteur de Médecin du travail, médecin du patron ? L’indépendance médicale en question (2014), et Qui a tué les verriers de Givors ? Une enquête de sciences sociales (2017).


Dessin de Claire Robert

Louis-Pierre Wenès, 73 ans, les cheveux blancs méticuleusement ramenés vers l’arrière, est l’ancien numéro deux de la société France Télécom. A la barre, il revendique d’être volontiers « brut de décoffrage » et de se laisser facilement emporter par la colère : « je m’arrête là, ou je vais devenir grossier », dit-il plusieurs fois.

Pourtant, à une époque où le virilisme agressif n’est plus censé avoir la cote, dans une cour d’appel où tout rappelle la déférence qu’on se doit de montrer envers la justice, ce comportement « passe » sans remontrances excessives, comme une caractéristique pittoresque, pagnolesque, du personnage. Lorsqu’on a assisté à d’autres procès, on se rappelle que tous les prévenus ne sont pas logés à la même enseigne. Continuer la lecture de « Un homme en colère »

Qui est responsable ? Accusation, défense et personnification du management capitaliste

L’audience du mercredi 18 mai (après-midi) vue par Alexis Cukier, maître de conférences en philosophie à l’Université de Poitiers, co-animateur des Ateliers Travail et Démocratie. Il est l’auteur, notamment, de Le travail démocratique, Puf, 2018.


Nous entrons dans la salle d’audience. Au-dessus de la présidente du siège, Pascaline Chamboncelle-Saligue, un écran blanc affiche la projection d’un tableau indiquant une partie de la chronologie des faits en cause – la partie la plus visible met côte à côte les noms et brèves présentations des victimes, pour l’essentiel les salarié.e.s de France Télécom qui se sont suicidé.e.s ou ont tenté de se suicider, dont il a été question le matin. Cet après-midi porte sur les alertes, il s’agit de répondre à ces questions : que savaient les prévenus ? Qu’ont-ils et elles contribué à mettre en œuvre pour répondre à ces alertes ? Et de quoi précisément sont-ils et elles responsables ? Continuer la lecture de « Qui est responsable ? Accusation, défense et personnification du management capitaliste »

Ne leur pardonnez pas, ils savent ce qu’ils font

L’audience du mercredi 18 mai vue par Fabrice Larcade & Mélissa Viguié, magasinièr-es à la Bibliothèque nationale de France. Respectivement membre et secrétaire nationale de Sud Culture Solidaires. Membres de la commission juridique de Sud Culture Solidaires et de la commission conditions de travail de Solidaires.


« Je ne nie pas qu’il y ait eu un certain nombre d’événements graves et malheureux. Ce que j’affirme, c’est qu’il n’y a pas eu de crise de suicides chez France Télécom. »
Louis-Pierre Wenès, ex-Directeur Général-adjoint sur les opérations France

« Ils ne pouvaient pas ne pas savoir… »

C’est par ces mots que s’achève cette quatrième journée d’audience du procès en appel des ex-dirigeant-es1 de France Télécom/Orange, ces mots d’une ancienne employée, et déléguée syndicale élue à l’instance représentative nationale, qui témoigne à la barre des tentatives désespérées d’interpeller ces dirigeant-es sur le mal-être profond et généralisé des employé-es. Malgré les tentatives de déstabilisation des avocates de la défense, elle relate posément les alertes répétées des différentes organisations syndicales entre 2007 et 2009 sur la souffrance engendrée par les restructurations incessantes et la réduction du personnel. Continuer la lecture de « Ne leur pardonnez pas, ils savent ce qu’ils font »

J’ai un peu peur

L’audience du vendredi 13 mai vue par Rachel Saada, avocate en droit du travail et protection sociale. Son cabinet, L’Atelier des droits, a défendu la cause des familles des salarié·es du Technocentre de Renault qui se sont suicidés entre 2006 et 2007.


Dessin de Claire Robert

Vendredi 13, il fait beau, très beau mais pas encore chaud.

L’huissière est installée à une table devant la première chambre de la cour pour pointer les présents.

C’est la plus belle et la plus grande salle du « vieux palais ». Tandis que les peintures, les lustres, les fauteuils et les boiseries sont du 19ème siècle, les écrans et rétro-projecteur accrochés il y a peu ont trainé la salle jusqu’au 21ème siècle.

Ici on arrive presque à croire que la justice va bien et qu’elle a les moyens, qu’on respecte les gens, qu’on prend le temps de les écouter et peut être de les comprendre.

Comme les prévenus ont fait appel, on recommence tout comme si les premiers juges n’avaient rien fait du tout, comme si le jugement de première instance et ses 353 pages n’existait pas, comme si la société Orange ne l’avait pas accepté.

Oui, on refait tout parce que les premiers juges ont pu se tromper, parce que c’est ça le 2ème degré de juridiction. Et il ne faut pas le déplorer. Continuer la lecture de « J’ai un peu peur »

Patrons voyous ou politique d’entreprise ?

Du 11 mai au 1er juillet 2022 se tient « le procès de France Télécom » en appel. Cette deuxième audience du 12 mai est vue par Louis-Marie Barnier, sociologue du travail et représentant CGT au Conseil National d’Orientation des Conditions de Travail. Il est co-auteur avec Hélène Adam de La santé n’a pas de prix, voyage au cœur des CHSCT, Syllepse, 2013.


Dessin de Claire Robert

La juge de la cour d’appel avait décidé d’axer cette seconde journée sur l’étude de la politique sociale de l’entreprise, avec pour fil conducteur cette question qui sera précisée au cours de la journée : « Est-ce que vous avez fait le maximum en matière de dialogue social, ou bien avez-vous placé le personnel en mal de prévention ? » Le malaise tout au long de la journée provient d’un sentiment : juge-t-on l’entreprise ou bien quelques dirigeants qui auraient dépassé les limites ? Continuer la lecture de « Patrons voyous ou politique d’entreprise ? »

Le retour du harcèlement de masse devant ses juges

Emmanuel Dockès est professeur de droit à l’université Lyon 2, derniers ouvrages parus aux éditions du Détour, une utopie, Voyage en misarchie, un roman, Le projet Myrdinn et aux éditions Dalloz une Proposition de code du travail (avec le GR-PACT) et un précis de Droit du travail.


Dessin de Claire Robert

L’audience d’appel de l’affaire France Telecom/Orange s’ouvre aujourd’hui, 11 mai 2022, quinze ans après les faits, trois ans après les condamnations ordonnées par le tribunal correctionnel. On recommence, pas tout à fait à zéro, mais presque. L’entreprise Orange n’a pas fait appel. La sentence qui lui fut infligée, le maximum de la peine encourue, est donc définitive. Olivier Barberot, DRH de France Telecom à l’époque des faits, condamné à un de prison dont quatre mois ferme, lui non plus n’a pas fait appel. Restent les autres, six prévenus au total, qui contestent tout, y compris et surtout leur culpabilité. Parmi eux, il y a notamment Didier Lombard, ancien président de France Telecom et Louis-Pierre Wenes, ancien président de la filiale France. Ce sont les anciens patrons d’une énorme entreprise. Ils ont navigué dans des sphères de pouvoir et d’argent si hautes, qu’habituellement la justice n’y passe pas. Et ce n’est pas le seul aspect exceptionnel de cette affaire, déjà entrée dans l’histoire du droit du travail.
Perdu dans les couloirs du Palais de justice à la recherche de la salle d’audience, j’interroge une gardienne. Elle m’indique le point d’orientation et me souhaite bon courage. Il y a de la compassion dans son regard. Comme j’ouvre des yeux interrogateurs, elle précise : « Le procès France Telecom, c’est dur ». Elle sait. Continuer la lecture de « Le retour du harcèlement de masse devant ses juges »

Verdict du procès France télécom: Un interdit majeur

Du 6 mai au 11 juillet 2019 s’était tenu le procès pour harcèlement moral au tribunal correctionnel de Paris à l’encontre de la société France Télécom (Orange aujourd’hui), Didier Lombard, Louis-Pierre Wenes et Olivier Barberot ainsi que Nathalie Boulanger, Guy Patrick Cherouvrier, Brigitte Dumont et Jacques Moulin, pour complicité.

Les 46 audiences de ce procès avaient permis de regarder en détail ce qui s’est déroulé pendant les années 2006 à 2010 dans la machine managériale d’une société du Cac 40. Tous les dispositifs furent mis à nu, les plans Next et Act, les parts variables, les discours à l’Acsed, les formations de l’école de management, les alertes des médecins du travail, des CHSCT et du CNHSCT, les présentations de diapositives sur les objectifs de – 22 000 salariés, les outils de pression, les « espaces développement », etc. Celles et ceux qui auront suivi ces longues audiences précises et détaillées ont pu voir la mécanique totale et globale à l’œuvre pour faire partir « par la porte ou par la fenêtre » plus de 22 000 salariés en 3 ans.

Ces audiences auront aussi permis de donner corps à celles et ceux qui ont subi, directement ou indirectement, et qui pour beaucoup restent profondément marqués dans leur intégrité par les méthodes brutales auxquelles ils furent confrontés. Parties civiles ou témoins ont pu dire leur vérité devant le tribunal et devant les prévenus.

Face à cette vérité, les prévenus n’auront livré que leur novlangue où l’euphémisme succède à la brutalité des mots pour continuer à esquiver leurs responsabilités et tenter de faire croire à la fable des « grands sauveurs de l’entreprise ». Ce n’est guère que sur leur propre sort qu’ils furent brièvement émus.

Ils furent là à toutes les audiences, en rang serré avec leur bataillons d’avocats qui débordait dans la salle dans une stratégie de défense collective qui fit dire au procureure qu’ils étaient « en bande organisée ». Pendant 41 jours, ce procès aura permis symboliquement de séquestrer plusieurs patrons avec le soutien de la police et de la justice…

Le délibéré a été rendu ce 20 décembre. Comme l’avait exprimé l’un de nos avocats, Jean-Paul Tessonnière, dans sa plaidoirie : « Le droit pénal a une fonction répressive et une fonction expressive. Il doit exprimer les interdits majeurs d’une société. La question que vous devez vous poser est simple, presque enfantine : est-ce que c’était interdit ? On attend de ce jugement qu’il indique que ce qui s’est passé à France Télécom doit être rangé parmi ces interdits majeurs. »

Le verdict prononcé à l’égard des prévenus est en effet exemplaire car il indique bien de manière claire un interdit majeur. En condamnant Didier Lombard, Louis Pierre Wenes et Didier Barberot à 1 année de prison, dont 8 mois avec sursis et 15 000 €..d’amendes, Nathalie Boulanger , Guy Patrick Cherouvrier, Brigitte Dumont et Jacques Moulin comme complices à 4 mois de prison avec sursis et .5000 €.d’amendes et, enfin la société France Télécom à 75 000.d’amendes. Au niveau civil, les condamnés devront verser plus de 5 millions d’€.

Pour l’union syndicale Solidaires qui s’était porté partie civile, la question centrale de ce procès n’était pas celle de la réparation ou de l’indemnisation mais bien celle de la condamnation de ces méthodes mortifères car nous devons les interdire, comme le fut en son temps l’amiante. Ce qui s’est passé dans cette entreprise et continue à se passer ailleurs concerne l’ensemble du monde du travail et cela doit cesser. Le jugement prononcé ce jour est un pas majeur dans la lutte contre les méthodes mortifères du capitalisme.

Dessins de Claire Robert.

Procès France Télécom Jour J pour le verdict

Du 6 mai au 12 juillet, s’est tenu le procès d’anciens hauts dirigeants de la multinationale France Télécom, devenue Orange, accusés harcèlement moral par une centaine de parties civiles dont Sud PTT et Solidaires. Durant celui-ci, de nombreuses personnalités, scientifiques, écrivains, artistes… vont écrire, dessiner, filmer des compte-rendus jour après jour, l’histoire du procès selon leur point de vue…Pendant ce procès exceptionnel, Basta! et la petite boîte à outils de l’union syndicale Solidaires vous avait proposé un suivi régulier des audiences.

Le verdict sera rendu  vendredi 20 décembre 2019 à 10 h du matin.

Procès France Télécom J-1 avant le verdict« Quelle forme peut prendre une guerre? » par Sandra Lucbert

Du 6 mai au 12 juillet, s’est tenu le procès d’anciens hauts dirigeants de la multinationale France Télécom, devenue Orange, accusés harcèlement moral par une centaine de parties civiles dont Sud PTT et Solidaires. Durant celui-ci, de nombreuses personnalités, scientifiques, écrivains, artistes… vont écrire, dessiner, filmer des compte-rendus jour après jour, l’histoire du procès selon leur point de vue…Pendant ce procès exceptionnel, Basta! et la petite boîte à outils de l’union syndicale Solidaires vous avait proposé un suivi régulier des audiences. Le verdict sera rendu vendredi 20 décembre 2019 à 10 h du matin. Nous publions un certain nombre d’interviews et de textes d’ici là.

Aujourd’hui deux audiences de juin et juillet 2019 du procès France Télécom, vues par Sandra Lucbert, romancière, autrice, entre autres, de « Mobiles« , Flammarion et « La toile« , Gallimard. A la suite du compte rendu écrit en juillet pour Solidaires, Sandra Lucbert a poursuivi par l’écriture d’un livre (de littérature); il doit normalement paraître aux éditions du seuil à la rentrée littéraire de septembre 2020.

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Procès France Télécom J-2 avant le verdict, le témoignage d’Eric Beynel pour Solidaires

Du 6 mai au 12 juillet, s’est tenu le procès d’anciens hauts dirigeants de la multinationale France Télécom, devenue Orange, accusés harcèlement moral par une centaine de parties civiles dont Sud PTT et Solidaires. Durant celui-ci, de nombreuses personnalités, scientifiques, écrivains, artistes… vont écrire, dessiner, filmer des compte-rendus jour après jour, l’histoire du procès selon leur point de vue…Pendant ce procès exceptionnel, Basta! et la petite boîte à outils de l’union syndicale Solidaires vous avait proposé un suivi régulier des audiences.

Le verdict sera rendu vendredi 20 décembre 2019 à 10 h du matin. Nous publions un certain nombre d’interviews et de textes d’ici là. Aujourd’hui une interview d’Eric Beynel, porte parole de Solidaires, à la sortie de l’audience où il a pris la parole au procès des suicides à France Télécom.

Procès France Télécom J-4 avant le verdict, le témoignage de Jean-Paul Tessonière

Du 6 mai au 12 juillet, s’est tenu le procès d’anciens hauts dirigeants de la multinationale France Télécom, devenue Orange, accusés harcèlement moral par une centaine de parties civiles dont Sud PTT et Solidaires. Durant celui-ci, de nombreuses personnalités, scientifiques, écrivains, artistes… vont écrire, dessiner, filmer des compte-rendus jour après jour, l’histoire du procès selon leur point de vue…Pendant ce procès exceptionnel, Basta! et la petite boîte à outils de l’union syndicale Solidaires vous avait proposé un suivi régulier des audiences.

Le verdict sera rendu vendredi 20 décembre 2019 à 10 h du matin. Nous publions un certain nombre d’interviews et de textes d’ici là. Aujourd’hui une interview de Jean-Paul Teissonnière, avocat des parties civiles au procès France Télécom, victimes du management pathogène dans toute l’entreprise, évoque les aspects juridiques, la notion de harcèlement, l’exemplarité du procès:

Procès France Télécom J-7 avant le verdict, le témoignage de Danièle Linhart

Du 6 mai au 12 juillet, s’est tenu le procès d’anciens hauts dirigeants de la multinationale France Télécom, devenue Orange, accusés harcèlement moral par une centaine de parties civiles dont Sud PTT et Solidaires. Durant celui-ci, de nombreuses personnalités, scientifiques, écrivains, artistes… vont écrire, dessiner, filmer des compte-rendus jour après jour, l’histoire du procès selon leur point de vue…Pendant ce procès exceptionnel, Basta! et la petite boîte à outils de l’union syndicale Solidaires vous avait proposé un suivi régulier des audiences.

Le verdict sera rendu vendredi 20 décembre 2019 à 10 h du matin. Nous publions un certain nombre d’interviews et de textes d’ici là. Aujourd’hui une interview de la sociologue Danièle Linhart à la sortie de l’audience où elle témoigne au procès des suicides à France Télécom:

Procès France Télécom J-8 avant le verdict

Du 6 mai au 12 juillet, s’est tenu le procès d’anciens hauts dirigeants de la multinationale France Télécom, devenue Orange, accusés harcèlement moral par une centaine de parties civiles dont Sud PTT et Solidaires. Durant celui-ci, de nombreuses personnalités, scientifiques, écrivains, artistes… vont écrire, dessiner, filmer des compte-rendus jour après jour, l’histoire du procès selon leur point de vue…Pendant ce procès exceptionnel, Basta! et la petite boîte à outils de l’union syndicale Solidaires vous avait proposé un suivi régulier des audiences.

Le verdict sera rendu vendredi 20 décembre 2019 à 10 h du matin. Nous publions un certain nombre d’interviews et de textes d’ici là. Aujourd’hui une interview d’Yves Minguy, ancien salarié victime des restructurations à France Télécom, partie civile au procès, témoigne quelques instants après son audition par le tribunal:

 

Jour 41 – Le brave « Mr Lombard »

La dernière audience du 11 juillet 2019 du procès France Télécom, vue par Ivan du Roy, journaliste, co-fondateur de Basta !. S’est formé au management en enquêtant sur France Télécom (Orange stressé, éd. La Découverte). A auparavant accompagné l’un des derniers journaux issus de la Résistance (Témoignage Chrétien) ainsi que Politis.

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Jour 40 – La raison des plus forts

L’audience du 10 juillet 2019 du procès France Télécom, vue par Nicolas Jounin, sociologue, a enseigné pendant sept ans à l’université Paris-8-Saint-Denis. Il est l’auteur, à La Découverte, de Chantier interdit au public. Enquête parmi les travailleurs du bâtiment (Poche 2009), et, avec Pierre Barron, Anne Bory, Sébastien Chauvin et Lucie Tourette, de On bosse ici, on reste ici ! La grève des sans papiers : une aventure inédite (2011)  et Voyage de classes (2014).

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Jour 39 – qui dans cette salle n’a jamais mal répondu à un téléconseiller ?

L’audience du 9 juillet 2019 du procès France Télécom, vue par Valérie Gérard, professeure de philosophie à Vanves, directrice de programme au Collège international de philosophie; elle vient de publier Par affinités, amitié politique et coexistence, aux éditons MF; elle aime bien Platon.

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Jour 38.2 – Des Bisounours en costume

L’audience du 8 juillet 2019 du procès France Télécom, vue par Sylvain Creuzevault, auteur, metteur en scène et comédien . Depuis 2016, il est installé à Eymoutiers, en Haute-Vienne, où il transforme d’anciens abattoirs en lieu de théâtre avec le groupe Ajedtes Erod. Parmi ses dernières pièces Angelus Novus AntiFaust en 2016 au théâtre de la Colline, Banquet Capital en 2018, et  Les Démons, Odéon-Théatre de l’Europe, Ateliers Berthier en 2018.

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Jour 38.1 – La défense : dire le droit contre la société ?

L’audience du 8 juillet 2019 du procès France Télécom, vue par Nicolas Hatzfeld, historien, enseignant au département d’histoire de l’Université d’Evry Val d’Essonne. Il travaille sur l’histoire du travail, l’histoire industrielle et l’histoire de la santé au travail, parmi ses publications citons Les gens d’usine. Peugeot-Sochaux, 50 ans d’histoire, éditions de L’Atelier, 2002, ou avec  Michel Pigenet et Xavier Vigna  (dir.), Travail, travailleurs et ouvriers d’Europe au XXe siècle, Editions universitaires de Dijon, 2016, bibliographie.

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Jour 36.2 – Parler pour ceux qui n’ont plus de voix

L’audience du 4 juillet 2019 du procès France Télécom, vue par Danièle Linhart, Sociologue, Directrice de recherches au CNRS, travaillant sur l’évolution du travail et de l’emploi, auteure, entre autres, de La comédie humaine du travail. De la déshumanisation taylorienne à la sur-humanisation managériale, Érès, 2015.

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Jour 36.1 – Alerte Orange (le monde déconnecté)

L’audience du 4 juillet 2019 du procès France Télécom, vue par Jean Rochard, producteur artisanal pour la maison de disques nato (fondée en 1980), amateur de disques à thèmes (Buenaventura Durruti, Left dor Dead, Chroniques de résistance…) est membre du collectif de producteurs indépendants les Allumés du Jazz et rédacteur pour le journal du même nom. Skuury est musicien électronique, il a publié pour Eyemyth Records The last straw et Busy Target.

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Jour 35 – Un procès qui brise le cours normal du temps

L’audience du 3 juillet 2019 du procès France Télécom, vue par Laurent Vogel,  Juriste, chercheur dans le domaine des conditions de travail, de la santé et de la sécurité à l’Institut syndical européen (ETUI), responsable du magazine Hesamag et enseignant, notamment en droit de la santé au travail, à l’Université libre de Bruxelles et à l’Université Paris XIII. 

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Jour 34.2 – Des larmes oranges

L’audience du 2 juillet 2019 du procès France Télécom, vue par Marin Ledun,  romancier, auteur de Les visages écrasés (Le Seuil, 2011), adapté au cinéma avec Isabelle Adjani et Corinne Masiero en 2016, L’homme qui a vu l’homme (Flammarion, 2014) et La vie en rose (Gallimard, 2019), d’essais parmi lesquels Pendant qu’ils comptent les morts (co-écrit avec Brigitte Font le Bret et Bernard Floris, La Tengo, 2010) et Mon ennemi intérieur (éd. Du Petit Ecart, 2018), ainsi que de pièces radiophoniques sur la violence au travail pour France Culture.

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Jour 34.1 – Troisième acte

L’audience du 2 juillet 2019 du procès France Télécom,vue par Fabienne Hanique, professeure de sociologie clinique à l’ Université Paris Diderot, membre du Laboratoire de Changement Social et Politique, responsable du master 2 Théories et Pratiques de l’intervention Clinique dans les Organisations. Elle est notamment l’auteure de le sens du travail -chronique d’une modernisation au guichet- (Eres, poche 2015) et le capitalisme paradoxant (avec V . de Gaulejac), (Le Seuil, 2016)

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Jour 33 – Reproductions

L’audience du 1 juillet 2019 du procès France Télécom,vue par Dominique Lhuillier, professeure émérite en santé et travail au centre de recherche sur le travail et le développement (CNAM). Parmi ses publications citons Cliniques du travail (érès, 2006) et Que font les 10 millions de malades ? (avec AM Wasser, érès, 2016).

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Procès France Telecom : la privatisation est-elle coupable ?

Pendant le procès exceptionnel de France Télécom et de ses anciens dirigeants, Basta! et la petite Boîte A Outils de l’union syndicale Solidaires vous proposent un suivi régulier des audiences avec les comptes-rendus jour après jour de nombreuses personnalités, scientifiques, écrivains, artistes pour en écrire une histoire collective… Basta! avec Radio Parleur se sont réunies pour plonger au cœur de cette affaire pour une  seconde émission spéciale, mercredi 26 juin, d’une série de trois émissions que nous relayons.

Nous publions aussi la seconde chronique réalisée à cette occasion par Prisca Da Costa, journaliste de Radio Parleur qui suit les audiences.

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Jour 31 – Le suicide de Rémy Louvradoux

L’audience du 27 juin 2019 du procès France Télécom a permis d’aborder le  cas de Rémy Louvradoux qui  s’est donné la mort en s’immolant par le feu à Mérignac (Gironde) sur le parking de l’entreprise, le 26 avril 2011.  C’est Noémie Louvradoux, une de ses filles qui a témoigné à l’audience accompagnée de sa mère, de ses deux frères et de sa sœur. Nous avons écouté les premières impressions à la sortie de l’audience de Raphaël Louvradoux, l’un des fils de Rémy Louvradoux.

 

Jour 29.1 – Inégalités et rapports de pouvoir au tribunal

L’audience du 24 juin 2019 du procès France Télécom, vue par Emmanuel Henry, politologue et sociologue à l’Université Paris-Dauphine, PSL University, CNRS, auteur de Ignorance scientifique et inaction publique. Les politiques de santé au travail, Presses de Sciences Po, 2017 et Fabriquer des irresponsables, Sociologie du travail, 61 (2), Avril-Juin 2019.

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Le procès France télécom vu par Claire Robert

En attendant les prochains comptes-rendus d’audience nous vous proposons quelques dessins inspirés par le procès que nous a fait parvenir Claire Robert, graphiste et dessinatrice de presse, qui participe aux comptes rendus du procès depuis le 6 mai et  dont vous pouvez visiter le site. Merci à elle pour cet envoi.

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Retour sur le jour 23 – Le suicide de Michel Deparis le 14 juillet 2009

L’audience du 13 juin 2019 du procès France Télécom a permis d’aborder le  cas emblématique de Michel Deparis, dont le suicide le 14 juillet 2009 a marqué, pour la présidente du tribunal, Cécile Louis-Loyant, et pour beaucoup d’observateurs, un tournant dans la crise qu’a connue l’entreprise. Nous avons interviewé Sylvie Topalof, avocate de Sud PTT et de Solidaires à la sortie de cette audience particulièrement émouvante.

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Jour 26 – Une santé au travail complexe et mal connue par les prévenus et la défense

L’audience du 18 juin 2019 du procès France Télécom, vue par Marc Loriol, sociologue au CNRS, IDHE.S Paris 1, auteur, entre autres, avec Nathalie Leroux, de Le travail passionné, l’engagement artistique, sportif ou politique, éditions Érès.

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Jour 24.2 – Ils ne savent pas la chance qu’ils ont…

L’audience du 14 juin 2019 du procès France Télécom, vue par Rachel Saada, avocate en droit du travail et protection sociale, cabinet « L’atelier des droits », a notamment défendu les familles dans les suicides des salarié·es du Technocentre Renault.

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Jour 23 – « Il y a eu un petit manque de bon sens managérial »

L’audience du 13 juin 2019 du procès France Télécom, vue par Vincent de Gaulejac, sociologue clinicien, professeur émérite à l’Université Paris Diderot, chercheur-intervenant sur les mutations du travail et ses effets sociopsychiques. Auteur d’une quinzaine d’ouvrages dont Travail, les raisons de la colère  et Le capitalisme paradoxant (avec Fabienne Hanique).

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Jour 22.2 – « Il y a des gens qui manifestement bottent en touche »

L’audience du 12 juin 2019 du procès France Télécom, vue par Maëlezig Bigi, sociologue, chercheuse au Centre d’études de l’emploi et du travail (Cnam), associée au Laboratoire interdisciplinaire pour la sociologie économique (LISE), qui a notamment travaillé sur la notion de reconnaissance et les effets des rationalisations du travail.

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Jour 22.1 – Présences et absences dans le procès France Télécom

L’audience du 12 juin 2019 du procès France Télécom, vue par Métie Navajo, écrivaine, elle a publié des récits (L’Ailleurs mexicain, l’Esprit frappeur, La Geste des Réguliers, Rue des Cascades) et du théâtre (Dernière pièce publiée Eldorado Dancing, Espaces 34, 2019).

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Jour 21: Le témoignage de Fanny Jedlicki

L’audience du 11 juin 2019, début de la seconde moitié du procès France télécom,  a permis de revenir sur le rapport Technologia avec le témoignage de Fanny Jedlicki, docteure en sociologie. Celle-ci a participé en 2009/2010 à l’enquête du cabinet d’expertise agréé  comme consultante en risques psychosociaux (RPS) et conditions de travail. Nous publions sa déposition in extenso ainsi qu’une courte interview à sa sortie de l’audience.

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Jour 20.2 – #CorpsSocialMalade

L’audience du 7 juin 2019 du procès France Télécom, vue par Émilie Counil, chercheuse à l’Ined et associée à l’IRIS (Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux), travaille sur la production de savoir et d’ignorance en santé au travail, les biais de genre en épidémiologie des risques professionnels.

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Jour 20 – Chronologie d’une entreprise en crise

L’audience du 7 juin 2019 du procès France Télécom, vue par Arnaud Mias, professeur des universités en sociologie à l’Université Paris-Dauphine, chercheur à l’Institut de recherches interdisciplinaire en sciences sociales (Irisso), a notamment dirigé avec Cyril Wolmark le livre Agir sur la santé au travail. Acteurs, dispositifs, outils et expertise autour des enjeux psychosociaux, Éditions Octarès.

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Procès France télécom : Des mots sur des maux

Pendant le procès exceptionnel de France Télécom et de ses anciens dirigeants, Basta! et la petite Boîte A Outils de l’union syndicale Solidaires vous proposent un suivi régulier des audiences avec les comptes-rendus jour après jour de nombreuses personnalités, scientifiques, écrivains, artistes pour en écrire une histoire collective… Basta! avec Radio Parleur se sont réunies pour plonger au cœur de cette affaire pour une émission spéciale, mercredi 5 juin, première d’une série de trois émissions que nous relayons.

Nous publions aussi la chronique réalisée à cette occasion par Prisca Da Costa, journaliste de Radio Parleur qui suit les audiences.

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Jour 16 – La peur en partage…

L’audience du 31 mai 2019 du procès France Télécom, vue par Dominique Manotti, qui a toujours vécu à Paris, est une écrivaine française de roman noir, historienne, spécialiste de l’histoire économique du XIXe siècle, militante et syndicaliste, dernier roman paru Racket (l’histoire du rachat d’Alstom par GE) aux éditions Les Arènes.

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Jour 15 – Un jour ordinaire, de méthode et de sang, dans le procès d’un harcèlement de masse.

L’audience du 29 mai 2019 du procès France Télécom, vue par Emmanuel Dockès est Professeur de droit à l’université Paris Ouest Nanterre, cofondateur de l’université populaire de Lyon, dernier ouvrage paru, une utopie, Voyage en misarchie : essai pour tout reconstruire, éditions du détour.

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Jour 14 – « Ils ont exigé des fauteuils » (visite à une installation judiciaire)

Les audiences des 27 et 28 mai 2019 du procès France Télécom, vue par Serge Quadruppani, auteur de romans et d’essais, d’articles en ligne et sur papier, traducteur de l’italien, directeur de la collection « Bibliothèque italienne » chez Métailié, derniers livres parus Le monde des Grands Projets et ses ennemis, Voyage au cœur des nouvelles pratiques révolutionnaires, Éditions La Découverte et Sur l’île de Lucifer, Snag/La Geste Éditions.

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Jour 13 – Le Blues des Télécom

L’audience du 27 mai 2019 du procès France Télécom, vue par L’1consolable, auteur, compositeur et interprète de ses morceaux, rappe, sur de bons vieux breakbeats hip-hop teintés de jazz, de blues ou de soul, la violence d’une société qui la pratique au quotidien tout en la prêtant à ceux qui se retournent contre elle.


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Procès France Télécom : « En 2006, mon alerte est restée sans réponse »

Le Dr Christian Torres, ancien médecin du travail de France Télécom qu’il a quitté en 2008, a été l’un des tout premiers à alerter l’entreprise sur les risques psychiques. Il a répondu aux question de François Desriaux pour le journal Santé & Travail  sur les pressions subies et l’aveuglement de la direction. Un éclairage capital pour le procès en cours que la petite Boite A Outils diffuse à son tour.

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Jour 12 – Les mots, c’est quelque chose

L’audience du 24 mai 2019 du procès France Télécom, vue par Leslie Kaplan, écrivaine. Elle participe, depuis l’usine comme établi, au mouvement  de mai 1968. Depuis 1982, elle publie des récits, des romans, des essais, du théâtre, son dernier livre paru est Désordre, éditions P.O.L, mai 2019.

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Jour 11 – Affecté

L’audience du 23 mai 2019 du procès France Télécom, vue par Stéphane Bérard, artiste français qui développe une œuvre polymorphe où l’invention est un mode d’intervention critique. Il a réalisé à ce jour sept longs métrages, sept albums musicaux, cinq livres, une multitude de performances, de collaborations ainsi qu’une dizaine d’expositions personnelles. Et désormais un article pour la petite Boite A Outils.

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Médias et vidéos

Le site de Sud PTT
sur le procès

Le film

Carte des suicides au travail

Solidaires lutte depuis toujours pour rendre visible les atteintes à la santé des travailleuses et travailleurs. Partout les directions d'entreprises cherchent, au contraire, à rendre invisibles les suicides liées au travail. Nous avons décidé de les recenser et de les publier sur une carte. Nous allons procéder à cette mise en visibilité avec vous ! Si vous avez connaissance d'un suicide lié au travail, envoyez-nous via ce formulaire les informations sur le lieu, la date avec un lien l'ayant rendu public (communiqué ou tract syndical, articles de presse, etc.). Retrouvez également les outils de Solidaires pour agir.