Bayard : Une grille d’évaluation des salariés qui ne passe pas

Plus la crise s’aggrave, plus les conditions de travail des salariés se détériorent. Mais l’action des CHSCT peut éviter certaines dérives. Un exemple, l’action menée par le CHSCT de Bayard (La Croix, Notre Temps, Le Pèlerin, des titres pour la jeunesse).


Chaque année, les salariés ont un entretien d’évaluation individuel. Cette procédure était bien acceptée et permettait de faire le point avec le N+1 sur le bilan de l’année, les demandes de formation, de mobilité…
Or, cette année, la DRH a modifié le formulaire en y rajoutant une grille d’évaluation avec des « points forts « des points de maîtrise », des « points d’amélioration ». Parmi les items, « adaptabilité, innovation, créativité, implication, rigueur…. »
Cette grille était d’ailleurs en totale contradiction avec l’esprit de l’entretien annuel tel qu’il est décrit dans le guide de préparation des entretiens d’évaluation disponible sur intranet de l’entreprise: « l’entretien doit être centré sur des faits professionnels objectifs, réalisations concrètes, hors jugement de valeur » !

Comme des gamins…

Une grille qui laissait donc un boulevard à l’appréciation subjective des salariés. Ils étaient traités comme des gamins à qui on donne des notes !
De quoi inquiéter de nombreux salariés et même de surprendre de nombreux managers très mal à l’aise avec ce nouveau dispositif.

Les élus du CHSCT ont immédiatement réagi. En effet, cette instance doit être informée en cas de modification importante des outils d’évaluation des salariés ce qui n’a pas été le cas. Or les règles sont claires :
Le CHSCT doit être consulté lorsqu’il s’agit de mettre en place un nouveau système d’évaluation dont les modalités sont de nature à avoir des répercussions sur les conditions de travail (arrêt groupe Maurnay, Cass.soc., 28 nov. 2007, n° 06-21.964).
Le CHSCT, rappelons-le, une fois de plus, a pour mission “de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l’établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure” (C. trav, art L. 4612-1).

Or un entretien individuel annuel est, dans certaines entreprises un moment de stress intense compte tenu de la véritable toile d’araignée que sont certains formulaires et procédures d’évaluation. Un mauvais entretien et cela peut enclencher le la spirale infernale vers le licenciement. Ce stress a donc des conséquences graves pour la santé des salariés.

Deux exemples illustrent cette situation :
. l’un des suicides ayant eu lieu chez Renault a eu lieu après un entretien annuel.
. Une dépression nerveuse ayant eu lieu après un entretien individuel a d’ailleurs été qualifié d’accident du Travail (Cour de cassation, jurisprudence sociale Lamy N° 130 (19/09/2003)

CHSCT extraordinaire

Un CHSCT extraordinaire a donc eu lieu à Bayard. Fait exceptionnel, l’inspectrice du Travail était présente ce qui témoignait de l’importance de ce dossier pour la Direction Départementale du Travail.
Elle a d’abord rappelé que l’absence de saisine initiale du CHSCT pourrait constituer une entrave au fonctionnement de notre instance. Elle a également souligné que toute appréciation des salariés sur des critères subjectifs n’était pas légale.

Une action efficace

1/ Sous la pression de l’inspection du Travail et des élus la direction a décidé que la grille d’évaluation serait désormais facultative, et qu’elle pouvait rester vide si le manager ou le salarié le souhaitait !
2/ Pour les entretiens déjà rendus les salariés peuvent récupérer leur entretien à la DRH, et retirer la partie « grille d’évaluation »
3/ La direction confirme que ces tableaux ne pourront pas être utilisés dans le cadre d’une démarche disciplinaire
4/ Enfin, la direction s’engage à consulter le CHSCT pour discuter du formulaire d’entretien 2012

Nous avons informé tous les salariés par tract. Et un bon nombre d’entre eux nous ont remercié de notre action. La mise en place de cette fameuse grille les inquiétait beaucoup.