« Rien n’est Vrai, tout est vivant¹ » et « Pas ma faute »

La chronique du 2 juin vue par Roland Gori, psychanalyste, professeur honoraire des universités, auteur de La Fabrique de nos servitudes (2022, Les Liens qui Libèrent) ; préside actuellement L’Appel des appels, association initiée en 2009 avec Stefan Chedri pour protester contre la casse des services publics et la prolétarisation des professionnels, et Alain Abelhauser, psychanalyste, professeur des universités (psychopathologie clinique), auteur de Mal de femme (Seuil, 2013) et Un doute infini (Seuil, 2020) ainsi que, avec Roland Gori et Marie-Jean Sauret, de La folie Évaluation. Les nouvelles fabriques de la servitude (Mille et une nuits, 2011). Il a succédé à Roland Gori à la présidence du SIUEERPP (Séminaire Inter-Universitaire Européen d’Enseignement et de Recherche en Psychopathologie et Psychanalyse). Continuer la lecture de « « Rien n’est Vrai, tout est vivant¹ » et « Pas ma faute » »

Quand France Télécom fait école

L’audience du 1er juin vue par Guillaume Hallier et Gabrielle, militante et militant à Sud Éducation, membres de la commission conditions de travail.


Aujourd’hui, le point crucial abordé sera la « déflation » et ses outils : formation des cadres et managers et outils de contrôle. Autrement dit : comment faire partir 22 000 personnes de France Télécom en trois ans, entre 2006 et 2008. Ce qui nous frappe au cours de cette journée, c’est la désinvolture des prévenus en complet décalage avec l’objet des échanges : on parle bien de morts, de suicides, d’une catastrophe sociale et humaine. En effet, presque dix heures seront passées ce jour sur les choix et décisions liées à la déflation et qui ont mené au désastre que l’on connaît. Continuer la lecture de « Quand France Télécom fait école »

Petit manuel de défausse managériale

Audience du 1er juin vue par Lucie Goussard et Guillaume Tiffon, sociologues, ont notamment publié ensemble Syndicalisme et santé au travail, 2017, Éditions Le Croquant.


Au programme de ce mercredi 1er juin, deux thèmes pour le moins centraux de ce procès France Télécom : « la déflation », qui renvoie au plan de suppression des 22 000 emplois en trois ans, et « les outils de contrôle » déployés par la direction pour suivre sa mise en œuvre. Au sortir de cette journée, particulièrement dense et éprouvante, un constat, qui passerait presque inaperçu derrière l’aplomb des prévenus : malgré les drames humains dont il est ici question, malgré les faits accablants, malgré les circonstances tout à fait exceptionnelles de ce procès, Didier Lombard, Louis-Pierre Wenès, Guy-Patrick Cherouvrier, Brigitte Dumont, Nathalie Boulanger et Jacques Moulin n’expriment ni regrets, ni remords. A la barre, pas de pleurs, pas d’aveux, pas le moindre signe de culpabilité. Pour assurer leur défense, ils exposent bien plutôt au grand jour leur art de la rhétorique, celui grâce auquel d’ordinaire, lorsqu’ils sont sur leur « terrain de jeu », au sein des instances représentatives du personnel (IRP), tout glisse et semble n’avoir aucune prise sur eux. Alertes syndicales, expertises CHSCT, travaux universitaires, observatoire, inspection du travail, rapports de la médecine du travail, pression médiatique, procès…, rien n’y fait. Fidèles à leur posture, les prévenus démontrent, avec une constance désarmante, leur capacité à se défausser, comme s’ils se sentaient inatteignables, insaisissables même. Cette chronique se propose de revenir sur les différentes techniques utilisées au cours de cette journée pour nier leur responsabilité, à la manière d’un « manuel de défausse managériale ».

Dessin de Claire Robert

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