Questions/réponses

Questions d’une équipe syndicale : « Nous sommes confrontés à une restructuration avec une réorganisation dont l’impact sur les conditions de travail ne sont pas prises en compte. Au CHSCT, la Direction nous a répondu qu’elle ne pouvait pas donner d’informations sur la santé et les conditions de travail « tant que le projet n’est pas lancé ». Nous avons refusé de donner un avis mais la direction nous lance un ultimatum pour que cet avis soit formulé avant le prochain CE. Que faire ? »

Il faut d’abord rappeler les règles… « Le CHSCT est consulté avant toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (…) » Article L4612-8 du code du travail. L’employeur ne peut donc pas répondre qu’il attend le lancement du projet pour donner des informations.

La jurisprudence a récemment rappelé que si la communication au CHSCT peut être synthétique, elle doit néanmoins être précise sur les tenants et aboutissants (un document sommaire de quelques pages sous format PowerPoint remis au CHSCT et n’analysant pas la question des incidences d’un projet de réorganisation sur les conditions de travail est insuffisant (Cass. Soc. 25 septembre 2013, n° 12-21747).

Si le CHSCT considère que les informations qui lui sont données par la Direction dans le cadre d’une consultation sont insuffisantes il peut, par une délibération acter le fait qu’il ne pourra donner un avis que lorsqu’il aura tous les éléments pour cela. Ces informations insuffisantes peuvent être par exemple l’absence d’analyse des conséquences sur les conditions de travail en général ou sur les risques « psycho-sociaux », des informations très générales et très vagues (par exemple sur le déploiement d’un projet lorsque l’employeur se contente de transmettre les documents nationaux).

Si l’employeur persiste et ne tient pas compte de la demande du CHSCT d’obtenir les informations qui lui sont nécessaires, ou s’il met en œuvre la réorganisation sans attendre l’avis du CHSCT, il peut saisir les tribunaux. Il doit pour cela en réunion du CHSCT, désigner un membre pour engager une action en justice et donner mandat à un un avocat en droit social. Il est impératif de prendre évidemment contact avant la réunion avec le cabinet d’avocats pour rédiger avec lui le projet de délibération. C’est la Direction qui paiera les frais d’avocats.

Le CE doit refuser de donner un avis avant d’avoir celui du CHSCT. Le cas échéant, il peut saisir le juge sur l’irrégularité de la mise en œuvre sans avis du CHSCT et du CE. Dans ce cas le CE mandate un avocat par décision prise majoritairement pendant la réunion du CE. Il finance sur son budget de fonctionnement. Si les membres du CE s’estiment insuffisamment informés, ils ont la faculté de saisir le Président du Tribunal de Grande Instance selon une procédure accélérée, celui-ci ayant la faculté de proroger le délai de consultation en cas de difficultés particulières d’accès aux informations nécessaires à la formulation de l’avis motivé ( C. Trav. L2323-4)

Exemples de délibération pour saisir la justice :

Version refus de donner toutes les informations :

«  Le CHSCT prend acte du refus de la Direction de transmettre toutes les informations qui lui sont nécessaire pour donner un avis motivé sur la réorganisation faisant l’objet d’une consultation du CHSCT.
Le CHSCT donne mandat à M… ou, en cas d’impossibilité, à M… représentants du personnel au CHSCT, pour engager toutes les procédures administratives ou judiciaires nécessaires afin d’obtenir les informations nécessaires permettant au CHSCT de donner un avis.

Le CHSCT donne mandat au cabinet d’avocat ( …………) pour introduire les procédures et défendre ses intérêts auprès des tribunaux compétents.
Le CHSCT rappelle que les honoraires du cabinet d’avocat seront pris en charge par l’employeur. »
Version refus passage en force de la Direction :
« Le CHSCT prend acte de la décision de la Direction de mettre en œuvre la réorganisation (préciser) alors que le CHSCT n’a pas été en mesure de donner un avis motivé notamment sur les conséquences sur les conditions de travail et la santé des salarié-es concerné-es.
Le CHSCT donne mandat à M… ou, en cas d’impossibilité, à M… représentants du personnel au CHSCT, pour engager toutes les procédures administratives ou judiciaires nécessaires afin d’obtenir la suspension de la mise en œuvre de cette réorganisation tant que le CHSCT n’aura pas formulé un avis.
Le CHSCT donne mandat au cabinet d’avocat ( …………) pour introduire les procédures et défendre ses intérêts auprès des tribunaux compétents.
Le CHSCT rappelle que les honoraires du cabinet d’avocat seront pris en charge par l’employeur. »