Les cordonniers les plus mal chaussés !!

34-sud-travail-aff-socUn CHSCT à l’inspection du travail obligé de saisir le Tribunal  Administratif pour contraindre le DIRECCTE à faire respecter les droits du CHSCT

Les agents de l’inspection du travail accompagnés des salariés du privé n’ont cessé de dénoncer et de combattre la mise en œuvre d’une réforme, qui s’attaque à l’indépendance des agents de l’inspection du travail avec le renforcement de la ligne hiérarchique, qui diminue de 10% le nombre de contrôleurs et d’inspecteurs chargés du contrôle en entreprise, qui cherche à transformer l’inspection du travail d’un service public au service des salariés en un service d’aide aux entreprises agissant selon les seuls directives ministérielles.

C’est dans ce contexte que le 15 septembre 2014, la nouvelle organisation de l’inspection du travail est entrée en vigueur en Haute Normandie avec une telle détérioration de leurs conditions de travail que le CHSCT est contraint d’initier une procédure de Danger Grave et Imminent (DGI), le 19 septembre 2014.

La seule réponse du DIRECCTE, Président du CHSCT, sera de refuser de réaliser l’enquête obligatoire au motif que les risques psycho sociaux seraient hors champs de compétence de la procédure de DGI. Il faudra deux procédures en référé coup sur coup au Tribunal Administratif de Rouen pour que celui-ci suspende la décision de refus d’enquête du DIRECCTE et ordonne par décision du 4 décembre 2014 à l’administration de réaliser l’enquête. Cette décision fait d’une certaine manière jurisprudence. Ainsi dans les Pays de Loire, le DIRECCTE qui avait annoncé ne pas vouloir faire l’enquête suite à DGI, a fait marche arrière après l’intervention de l’inspecteur Santé Sécurité qui s’est appuyé sur la décision du TA de Rouen.

En Haute Normandie, alors que l’enquête est enfin en cours, les agents apprennent mi-janvier que le Ministère du Travail a saisi le Conseil d’Etat pour obtenir l’annulation de cette décision en référé. Une requête au fond a également été déposée pour voir acter l’annulation de la décision de refus d’enquête du DIRECCTE, décision illégale au regard des dispositions du Décret de 1982.

Le 29 décembre 2014, le CHSCT de la DIRECCTE de Haute Normandie avec le soutien des OS CGT et SUD Travail, déposait une autre requête au Tribunal Administratif en vue d’obtenir la suspension du projet jusqu’à la consultation du CHSCT compte tenu des risques démontrés sur la santé des agents. Le 8 janvier 2015, sans même convoquer les parties à l’audience pour entendre leurs explications, le Tribunal Administratif de Rouen rejette la demande considérant que le projet ne portait pas grief aux agents et que par conséquent ni les OS, ni le CHSCT n’étaient recevables à en demander la suspension et que le refus de consulter n’apparaissait pas illégal.

Ce type de décision constitue pour l’administration une autorisation de poursuivre à tour de bras les réorganisations et suppression de postes, peu importe les effets sur les conditions de travail et la santé du personnel. La CGT et Sud Travail ont décidé de ne pas baisser les bras et de saisir le Conseil d’Etat.

Dans le secteur public, les CHSCT n’existent que depuis 2011 avec la transformation des anciens CHS paritaires et l’administration met tout en œuvre pour en limiter les prérogatives. La bataille menée actuellement par le CHSCT de la DIRECCTE, la CGT et Sud Travail repose sur des objectifs qui dépassent le cadre de la DIRECCTE avec des enjeux pour toute la fonction publique.

Il s’agit notamment :

  • De faire juger qu’il y a toujours URGENCE à agir lorsque la santé des agents est en jeu et que l’action en référé est justifiée,
  • De faire reconnaitre l’obligation de consulter le CHSCT avant toute réorganisation ayant des conséquences sur les conditions de travail,
  • D’obtenir la reconnaissance de la personnalité juridique du CHSCT à agir devant les tribunaux,
  • D’obtenir, à défaut de budget, le paiement des honoraires de l’avocat du CHSCT par l’administration,

Rappelons que dans le secteur privé, le président de CHSCT qui s’oppose à la mise en œuvre de l’enquête s’expose à une sanction pénale pour délit d’entrave, ce qui est impossible dans la fonction publique…Encore un comble, les fonctionnaires chargés de sanctionner ces délits d’entrave dans les entreprises sont quant à eux totalement privés de ce droit face à l’administration!