Cette livraison de La Nouvelle Revue du Travail du printemps 2015 propose un Corpus sur un objet original, les émotions au travail. Espace de violences et de solidarités, le travail suscite des sentiments d’injustice, de colère, d’envie, de haine, mais aussi de satisfactions et de plaisirs. Le travail mobilise les individus dans leur «entier», corps et âme, les incitant à s’appuyer sur des savoir-faire techniques mais également affectifs, à engager leur enthousiasme comme leur envie de bien faire, avec des résultats toujours traduits en émotions. En même temps, le management joue des émotions et participe de la mise au travail des émotions et pourrait les instrumentaliser. Six auteurs répondent à leur manière à ces questionnements.
La Controverse présente un long entretien avec Bernard Friot qui propose non seulement une critique argumentée des sociétés contemporaines, mais surtout, un modèle alternatif, charpenté, précis, fondé sur une lecture originale des acquis qu’il juge révolutionnaires de l’institution salariale. Ses réflexions interpellent et parfois dérangent, agacent, suscitent du scepticisme, voire des réactions d’hostilité. Il répond ici sur la faisabilité du projet de société qu’il défend dans plusieurs de ses livres.
Dans la rubrique Varia, Frédéric Lebaron examine ce qu’il dénomme, la financiarisation de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) en
analysant les processus de croyance, liés notamment au rôle moteur de la science économique dans l’ordre social contemporain, en étroite liaison
avec les caractéristiques du capitalisme contemporain.
Les Matériaux offerts par ce numéro proviennent d’un entrepôt logistique où les ouvriers trient et ordonnent des milliers de colis venus d’Asie, avant de composer les commandes pour les 220 magasins d’une grande chaîne de distribution. Le management vocal, via un casque auditif et un micro, contraint le temps et les espaces de travail des ouvriers.
Dans Champs et contrechamps, Manuela Frésil parle de son dernier film Entrée du personnel qu’elle a réalisé avec les ouvriers et ouvrières des abattoirs en Bretagne et en Normandie : elle dit ses attaches au cinéma de Jean-Rouch tout en s’en démarquant pour proposer un film politique de
réflexion sur le travail.
Enfin, plus d’une quinzaine de recensions et de notes de lecture analysent, quelquefois sans concession, les ouvrages les plus marquants parus récemment.