Justice pour les salariés de SAFT

Le 21 décembre 2017 à 14h, la Cour d’Appel de Bordeaux s’est de nouveau penchée sur les conséquences subies par des dizaines de salariés contaminés au cadmium sur le site de SAFT de Nersac (Charente).

Le premier jugement du 12 janvier 2016 avait condamné l’entreprise et le dirigeant du site pour mise en danger de la vie d’autrui avec risque immédiat de mort ou d’infirmité. Cette décision n’avait cependant pas satisfait les 65 parties civiles (dont un salarié décédé), qui réclament une sanction et des indemnités à la hauteur de ce scandale sanitaire.

Le rappel des faits est édifiant, alors qu’en 1973 la communauté scientifique qualifiait le cadmium comme étant hautement toxique, cancérogène, et générateur d’un empoisonnement cumulatif sans effet de seuil, l’entreprise SAFT en parfaite connaissance de cause a exploité le site de Nersac durant 20 ans sans assurer le moindre investissement nécessaire pour assurer son obligation légale relative à la protection et la santé de ses salariés.

C’est par l’intervention d’un nouveau médecin du travail (poussé à la porte en 2015), appuyé par le CHSCT que le scandale est révélé : en 2012, 82 inaptitudes au travail ! La direction consciente de la mise en danger de ses salariés a malgré tout refusé d’assumer ses responsabilités : en 2013, le site passe sous la coupe de la société Arts Energy, créé pour la circonstance.

Cette société administrée encore aujourd’hui par l’ancien directeur du site SAFT, Patrice LE REUN, affirme sur son site internet que « l’humain est la clé de l’excellence », ce qui cache bien les conditions de travail déplorables.

Les Syndicats SUD INDUSTRIE et les Unions départementales SOLIDAIRES de la Gironde et de la Charente dénoncent cette logique purement financière qui pour préserver ses profits se débarrasse de ses salariés quand ils deviennent encombrants.

Les salariés de SAFT seront au tribunal pour se faire entendre à défaut de leur employeur, par la justice, mais demain serait-ce encore possible ? On peut s’en inquiéter, alors que le cas des ouvriers de SAFT est loin d’être isolé.

Selon le procureur de Paris, il n’y a pas lieu de continuer les instructions sur les enquêtes pénales concernant l’amiante au seul argument que l’on ne peut déterminer avec certitude le lieu d’origine de l’intoxication ! Que de nombreux anciens salariés d’un même site industriel, fortement contaminés par l’amiante en soient tous victimes, n’est pas suffisant pour s’interroger sur la responsabilité des entreprises et de leur dirigeants,
selon ce représentant de l’État.

Depuis le gouvernement a emboîté le pas, les ordonnances Macron remettent en cause les CHSCT, qui perdent leur autonomie en devenant de simples commissions d’un CSE de congestion, avec pour mission de « promouvoir » la santé au lieu de prévenir et protéger.

Quant aux remontées d’infos du terrain auprès de leur employeur par les remplaçants des Délégués du personnel, elles ne pourront pas porter sur la santé des salariés.

Pour les métiers pénibles, la précarité grâce à ces ordonnances, deviendra la norme. La stratégie de l’industrie du nucléaire masquant les victimes des radiations va être généralisée et amplifiée, par le développement des auto-entrepreneurs effectuant le sale boulot, sans réel suivi médical et sans patron contre qui se retourner… Les agriculteurs eux aussi sont aujourd’hui
auto-entrepreneurs, et ce sont les premières victimes des pesticides, y aura-t’il un jour un procès sur les scandales Bayer/Monsanto ?

La cerise sur le gâteau offerte par le gouvernement Macron aux industriels, sera la suppression du compte pénibilité, remplacé par le compte professionnel de prévention excluant les risques chimiques, privant ainsi les ouvriers d’entreprises telles que Saft, ou Triskalia, du droit à une compensation pour des expositions avérées attentatoires à leur espérance de vie.

Toutes les actions du gouvernement visent à retirer aux salariés les moyens de se défendre et de mettre en évidence des pratiques patronales peu avouables. Ils subissent ainsi une double peine, alors que la principale cause de toutes ces souffrances est l’organisation du travail imposée dans les entreprises.

Le scandale du cadmium, c’est le scandale d’une entreprise qui a délibérément mis ses salariés au pilori pour engranger d’importants profits financiers destinés aux actionnaires.

Sans le CHSCT et sans l’unité, les salariés, n’auraient pu mener le combat actuel.

Les Syndicats SUD industrie et les Unions départementales Solidaires de la Gironde et de la Charente, resteront au côté des salariés de SAFT et continueront de mener le combat contre des organisations du travail mortifères et des projets gouvernementaux bâtis dans les antichambres du MEDEF, dont le seul objectif est de satisfaire les actionnaires au dépens de leurs salariés mais aussi de l’environnement.

A suivre…