Jour 13 – Le Blues des Télécom

L’audience du 27 mai 2019 du procès France Télécom, vue par L’1consolable, auteur, compositeur et interprète de ses morceaux, rappe, sur de bons vieux breakbeats hip-hop teintés de jazz, de blues ou de soul, la violence d’une société qui la pratique au quotidien tout en la prêtant à ceux qui se retournent contre elle.


Couplet 1 :

Comme dit Nabila : « Non, mais allô! »
Y’a-t-il quelqu’un au bout du fil, ou bien sont-ils tous tombés à l’eau ?
Où sont ceux qui se défilent, tous ceux qui détalent, au
fond en ont jeté d’autres par-dessus bord pour alléger l’bateau ?
Ces cons mégalos sont des salauds et ils ont des noms :
Didier Lombard, Louis-Pierre Wenes, Olivier Barberot !
Ces patrons pourraient avoir de la compassion, mais non:
on a pu voir lors de leur audition qu’ils n’en ont pas trop !
Les trois gros poissons de la boîte dont l’action
compte, marque son inféodation aux monde des transactions,
embarque son personnel et multiplie les exactions,
c’est le pacson que l’actionnariat vise, pas l’émancipation !
L’implication? 60 suicides, 40 tentatives
en 3 ans, la liste s’accroissant de tant de gens captifs
des désirs cupides que chez d’autres le CAC 40 avive,
lesquels ne s’en lamentent pas, arrivent de manière apparente à vivre
avec les pertes massives que leur intendance active,
il semble que ce soit de santé, voire de vie, dont l’emploi prive !
Et ce bien que Lombard nie d’une façon faussement naïve
toute espèce de responsabilité – « Je n’y peux rien », lancera-t-il-,
gardons-nous de conclusions hâtives mais une lame dans le ventre à vif,
en pleine réunion, qu’Yonelle se plante ravive
nos soupçons, car leur souci comme le jugement arrive
ce n’est pas tant la vérité, qu’évidemment le tarif !

Refrain :

C’est le blues des Télécom,
Louis-Pierre Wenes sonne la fin de la récré comme
les actionnaires exigent de maximiser les sommes,
quand c’est la mort que les salariés désespérés se donnent !

Z’ont comme le blues chez France Télécom,
service public réduit à vendre des abonnements de téléphones,
et se trouve là tout le drame de ces femmes et ces hommes
qui ont payé cher le fait que leurs chefs et boss déraisonnent !

Couplet 2 :

Qui voit rouge quand France Télécom devient Orange, lesquels donc perdent au change ?
Lesquels prennent cher quand les actionnaires sont aux anges ?
Les fonctionnaires sont poussés vers la porte,
ils ont beau faire, faut que ça rapporte,
Leur calvaire? Peu importe, les trois autres se rangent
dans le camp de la finance; suivent les plans NEXT et ACT,
faut que les gens se taisent et partent, quant à ceux qui restent et jactent,
la pression, le stress les mate, ils se défenestrent et l’acte
final verra 60 d’entre eux tomber échec et mat !
Dès 2004 la sonette d’alarme est tirée,
le quotidien infernal pour ceux qui n’ont pas daigné se tirer,
le service public a expiré, beaucoup de salariés s’apprêtent à être virés,
la souffrance s’étend et le temps s’est étiré.
C’est l’Agent Orange, oui mais au bout du rouleau,
roulé dans la farine à cause de ce qui se déroule au boulot,
le Lean Management piétine leur taf et foule aux
pieds leurs droits, ils sont épiés, et s’ils ne marchent pas droit, sous l’eau!
C’est tout l’objectif: 22 000 suppressions de postes en le faisant,
le choc s’en ressent, le cost-killer te fuck, on le sent !
Versons donc le sang du personnel, les pressions pesant
lourd ça se tue tout-à-tour comme Stéphanie (32 ans) !
Pour l’ex n°2, surnommé « La Brute »
la réduction des effectifs n’est pas fictive, non, mais abrupte !
Que France Télécom « se modernise », soit dans le coup, c’est ça le but :
un infime nombre donne les coups, pour tout le reste c’est la chute !

Refrain :

C’est le blues des Télécom,
Louis-Pierre Wenes sonne la fin de la récré comme
les actionnaires exigent de maximiser les sommes,
quand c’est la mort que les salariés désespérés se donnent !

Z’ont comme le blues chez France Télécom,
service public réduit à vendre des abonnements de téléphones,
et se trouve là tout le drame de ces femmes et ces hommes
qui ont payé cher le fait que leurs chefs et boss déraisonnent !

Couplet 3:

Pour Lombard, la crise n’est pas sociale mais médiatique,
à trop parler de suicides, des intéressés rappliquent,
pour lui et sa clique c’est l’explication tombée à pic !
Se suicider? Des salariés aiment l’idée et l’appliquent !
C’est pratique l’effet Werther pour toutes les faire taire
quand quelques voix alertèrent sur l’effet de ces pratiques,
c’est magique le management, pourtant délétère,
serait tiré d’affaire pour ce qui est de ces décès tragiques !
Ce n’est pas le harcèlement, l’isolement,
ni le stress qui s’agrippe aux gens qu’ils décrètent ignorants, que la boîte a mis au ban,
faudrait pas qu’on le lie aux plans NEXT et ACT,
oui autant le dire si tout ça vire au grand carnage c’est que ces gens aimaient l’acte :
le suicide ? Rien de tel quand tout va bien,
c’est ce que Lombard laisse entendre en niant ce à quoi tout ça tient !
Que ce soit dû au travail ? Rien ne le prouvera, rien
ne pourra mettre en cause le rôle de l’entreprise, et surtout pas le sien,
ni le sens du taf qu’ils écorchaient, ni les mobilités forcées,
ni les hostilités lancées contre tous ceux qui s’efforçaient
de conserver le sens, or c’est le rythme qui s’est corsé,
ni les mutations du taf que le PDG d’alors sait :
les anciens techniciens devenus des vendeurs,
pour maximiser le revenu de l’entreprise et de ses détenteurs,
n’en sont jamais revenus, laissant leurs familles en pleurs,
la course aux profits a un prix dont on apprit l’ampleur !

Refrain :

C’est le blues des Télécom,
Louis-Pierre Wenes sonne la fin de la récré comme
les actionnaires exigent de maximiser les sommes,
quand c’est la mort que les salariés désespérés se donnent !

Z’ont comme le blues chez France Télécom,
service public réduit à vendre des abonnements de téléphones,
et se trouve là tout le drame de ces femmes et ces hommes
qui ont payé cher le fait que leurs chefs et boss déraisonnent !

Chœurs :

C’est le blues des Télécom !

Dessins de Claire Robert.