Des jurisprudences autour du CHSCT 

  1. Pour avoir un représentant syndical au CHSCT il faut être représentatif
  2. En l’absence de CHSCT  le délégué du personnel désigné secrétaire du CHSCT doit être un titulaire
  3. Qui peut définir le périmètre des CHSCT ?
  4. Prise en charge des frais de justice en cas de contestation du recours à une expertise
  5. Le CHSCT ne peut pas imposer à l’employeur une dépense supplémentaire
  6. Désignation du CHSCT : il peut y avoir des votes distincts mais un dépouillement unique


Pour avoir un représentant syndical au CHSCT il faut être représentatif
Pour avoir un représentant syndical au CHSCT il faut être représentatif
La possibilité de désigner dans les entreprises ou établissements de plus de 300 salarié-es un représentant syndical pour assister avec voix consultative au CHSCT résulte de l’article 23 de l’accord cadre du 17 mars 1975 sur l’amélioration des conditions de travail. Cette disposition qui ne relève pas de la loi mais d’un accord collectif, n’impose aucune condition de représentativité.
La cour de cassation a repris le principe posé dans l’arrêt 07-43578 du 29 octobre 2008 et rappelé « que les organisations syndicales ne peuvent procéder à la désignation d’un représentant au CHSCT, conventionnellement prévue, que si elles sont représentatives dans l’entreprise ou l’établissement dans lesquels cette désignation doit prendre effet ».
Cass. soc., 22 février 2017, n°15-25591

En l’absence de CHSCT  le délégué du personnel désigné secrétaire du CHSCT doit être un titulaire
En l’absence de CHSCT dans les établissements d’au moins cinquante salariés (pour défaut de candidats par exemple), les délégués du personnel exercent les missions attribuées à ce comité avec les mêmes moyens et les mêmes obligations que celui-ci. L’article L. 2313-16 du code du travail ne prévoit aucune distinction entre les délégués du personnel titulaires et suppléants lorsqu’ils exercent les missions attribuées au CHSCT.
Dans cette affaire l’absence de candidats pour renouveler le CHSCT avait conduit les délégués du personnel à désigner un représentant suppléant en qualité de secrétaire. Il faut rappeler que dans les CHSCT du secteur privé il n’y a pas de représentant suppléant contrairement aux CHSCT de la fonction publique.
La cour de cassation a donné raison à  l’employeur qui demandait l’annulation de cette désignation : « le secrétaire du CHSCT est choisi parmi les représentants du personnel au sein de ce comité qu’il en résulte qu’en cas d’absence du CHSCT, seul un délégué du personnel titulaire peut exercer les missions dévolues au secrétaire de l’institution ».
Cass. soc., 22 février 2017, n°15-23571

Qui peut définir le périmètre des CHSCT ?
Dans les établissements d’au moins 500 salarié-es, c’est le comité d’entreprise en accord avec l’employeur qui détermine le nombre de CHSCT à constituer au regard de plusieurs éléments comme la fréquence et la gravité des risques, les dimensions et la répartition des locaux, le nombre des travailleurs, les modes d’organisation du travail. En cas de désaccord de l’employeur le nombre des CHSCT ainsi que les mesures de coordination sont arrêtés par l’inspecteur du travail. Article L 4613-4 du code du travail
Toute modification ultérieure du périmètre d’implantation des CHSCT en cas de pluralité, doit suivre la même voie.
C’est ce que vient de confirmer la cour de cassation qui a jugé irrégulière la désignation des représentants au CHSCT dont le périmètre avait été modifié sans saisir les comités d’établissement concernés et l’employeur. Dans cette affaire c’est par un vote unanime des deux CHSCT concernés que le transfert d’un site du périmètre d’un CHSCT à un autre avait été acté.
Cass. soc., 22 février 2017, n° 16-10770

Prise en charge des frais de justice en cas de contestation du recours à une expertise
D’une façon constante les frais de justice et en particulier les frais d’avocat engagés par le CHSCT en cas de contestation du recours à un expert sont pris en charge par l’employeur dès lors qu’aucun abus n’est constaté.
Dans cette affaire le CHSCT contestait l’arrêt de la cour d’appel d’avoir fixé à 7 000 €, les frais d’avocat dus pour l’expertise, alors que les frais engagés s’élevaient à près de 16 000 €.
La Cour de cassation a rejeté le pourvoi du CHSCT « rappelant qu’en cas de contestation, il incombe au juge de fixer le montant des frais et honoraires d’avocat, exposés par le CHSCT, qui seront mis à la charge de l’employeur en application de l’article L. 4614-13 du code du travail, au regard des diligences accomplies. »

Les juges disposent donc d’un total pouvoir souverain d’appréciation pour évaluer les sommes mises à la charge de l’employeur.
Cet arrêt risque de limiter les possibilités de recours du CHSCT si ses frais pour se défendre en justice ne sont pris que partiellement en charge.
Cass. soc., 22 février 2017, n° 15-10548

Le CHSCT ne peut pas imposer à l’employeur une dépense supplémentaire
En s’appuyant sur l’article L. 4614-9 du code du travail, qui prévoit que le CHSCT « reçoit de l’employeur les informations qui lui sont nécessaires pour l’exercice de ces missions, ainsi que les moyens nécessaires à la préparation et à l’organisation des réunions et aux déplacements imposés par les enquêtes ou inspections », le comité avait décidé par deux délibérations de faire appel à un prestataire extérieur pour rédiger les 92 procès-verbaux de réunion en attente ! Le CHSCT était passé outre l’opposition de la direction.

La cour de cassation a confirmé l’arrêt de la cour d’appel et annulé les deux délibérations du CHSCT. En s’appuyant sur ce même article du code du travail à savoir « le CHSCT reçoit de l’employeur les moyens nécessaires à la préparation et à l’organisation des réunions » la cour de cassation a considéré que le CHSCT « n’est pas fondé à décider unilatéralement de l’octroi de moyens supplémentaires ».
En outre, considérant d’une part que le CHSCT ne démontre pas l’insuffisance des moyens supplémentaires alloués par l’employeur pour faire face au retard, et que d’autre part il n’a pas tenu compte de l’opposition écrite de l’employeur à signer une convention avec le prestataire, la cour de cassation a conclu « à l’existence d’un abus du CHSCT dans l’exercice de son droit à agir ». Les frais d’avocat du CHSCT ne seront pas pris en charge par l’employeur.

Les enseignements que l’on peut tirer de cette jurisprudence : le CHSCT ne peut s’octroyer unilatéralement des moyens supplémentaires. Le choix des moyens nécessaires appartient à l’employeur, toutefois en cas de désaccord le CHSCT peut contester le choix opéré par l’entreprise, en faisant la démonstration de son insuffisance.
Cass. soc., 22 février 2017, n° 15-22392

Désignation du CHSCT : il peut y avoir des votes distincts mais un dépouillement unique
En fonction de l’effectif de l’établissement un certain nombre de sièges sont réservés au personnel de maitrise et d’encadrement. Dans ces situations lors de l’élection des représentant-es au CHSCT et il est admis qu’il puisse y avoir des votes distincts entre ces deux catégories de personnel.
Dans cette affaire lors du renouvellement d’un CHSCT, deux scrutins sont organisés, le dépouillement se fait séparément par collège, mais le résultat d’un des collèges est communiqué avant le vote de l’autre.
Pour ce motif une organisation syndicale a réclamé l’annulation de l’élection.
La cour de cassation lui a donné raison. Les juges considèrent que dans le cas de deux scrutins séparés : «  il doit être procédé à un vote concomitant pour chacun des scrutins et le dépouillement ne peut intervenir qu’après la fin de tous les votes, la connaissance par les membres du collège désignatif des résultats du scrutin précédent étant de nature à influer sur le choix fait lors du second scrutin et donc à fausser la sincérité de l’élection ».
Les juges de la cour de cassation ne sont pas allés rechercher si la connaissance du résultat d’un des deux collèges avait pu influencer le vote de l’autre collège.
Cass. soc., 18 janvier 2017, n° 15-27730